Exit le panier, Bercy lance un «trimestre anti-inflation»
Les distributeurs se sont engagés auprès du gouvernement, le 6 mars, à prendre sur leurs marges pour garantir «les prix les plus bas possible» sur un certain nombre de produits. En contrepartie, Bercy promet la réouverture des négociations commerciales en juin avec les grands industriels.
Après avoir enterré l'idée d'un «panier anti-inflation», le gouvernement a annoncé, le 6 mars, le lancement d'un «trimestre anti-inflation» dans la grande distribution. Ce dispositif garantira «les prix les plus bas possible sur un certain nombre de produits du quotidien pendant une durée d'un trimestre», a expliqué Bruno Le Maire. Le différentiel «sera pris sur les marges des distributeurs, assure Bruno Le Maire, ce qui représente un effort de plusieurs centaines de millions d'euros consenti par les distributeurs».
Les références seront librement choisies par les enseignes, contrairement au projet initial de panier anti-inflation qui prévoyait de définir les produits ou catégories de produits concernés. Les produits choisis devraient être «majoritairement (des) marques de distributeur», assure le directeur général de Carrefour, Alexandre Bompard. Ils seront identifiés en rayon par un logo aux couleurs tricolores. Cette annonce est l'aboutissement de plusieurs semaines de discussions, commencées à la mi-janvier, entre le ministère et la grande distribution sur la mise en place d'un panier anti-inflation.
Pressées d'agir pour freiner l'envolée des prix, les enseignes sont parties en ordre dispersé. Elles ont multiplié, le 5 mars, les annonces de modération de prix. Sans attendre de projet gouvernemental, Système U avait été, dès début février, la première enseigne à lancer son propre panier de «150 produits à prix coûtants» pour «une durée indéterminée». Carrefour, Intermarché et Monoprix lui ont emboîté le pas. Carrefour a annoncé qu'il allait lancer mi-mars son propre «panier anti-inflation» composé de 200 produits vendus en moyenne deux euros et «à prix bloqués» jusqu'à mi-juin. Intermarché a, de son côté, annoncé dimanche 5 mars le lancement d'une campagne sur «500 produits anti-inflation». Monoprix, enseigne du groupe Casino, a communiqué dans la même journée sur le maintien jusqu'à fin juin de son dispositif «Monopetitsprix» concernant 300 produits à des prix bloqués, auxquels viendront s'ajouter 87 produits supplémentaires à «prix contrôlés». Le patron de E.Leclerc, Michel-Édouard Leclerc, a annoncé que l'enseigne ne participerait pas à l'initiative de «trimestre anti-inflation». Interrogé sur le plateau de BFMTV, il a estimé que ses magasins «n'en ont pas besoin» et qu'il préférait être «le moins cher sur un panel plus large de produits».
Réouverture des négociations commerciales
Alors que le «trimestre anti-inflation» doit prendre fin en juin, le ministre de l'Économie, Bruno Le Maire, a ajouté que le gouvernement demandera «aux industriels de renégocier leurs prix avec la grande distribution» à ce moment-là. Son cabinet précise que la réouverture des contrats concernera bien «les grands industriels» et non toutes les entreprises de l'agroalimentaire. La réouverture des contrats est «importante pour les distributeurs et surtout pour les consommateurs», insiste-t-il. Les négociations annuelles ont abouti à une hausse globale des tarifs fournisseurs d'environ 10 %, d'après les estimations de la FCD (distributeurs), rejoint par l'Ania sur ce point.
Trimestre anti-inflation : associations de consommateurs, FNSEA et JA n'en veulent pas
Dans une lettre ouverte adressée à la Première ministre Élisabeth Borne le 9 mars, l'UFC-Que choisir, Familles rurales et la CLCV (consommateurs et usagers) critiquent le dispositif de «trimestre anti-inflation» dans la grande distribution porté par le gouvernement et réitèrent leur demande de suspension du relèvement du seuil de revente à perte de 10 % (SRP+10). «Votre gouvernement se contente aujourd'hui de s'en remettre à la bonne volonté de la grande distribution pour qu'elle limite ses marges», constatent-elles, dénonçant des «opérations purement marketing». Pour elles, le dispositif «n'aboutira en aucun cas à ce que les étiquettes affichent les prix les plus compétitifs possible» si le SRP+10 est maintenu. La proposition de loi (PPL) Descrozaille, qui doit être examinée en commission mixte paritaire (CMP) dans les prochaines semaines, prévoit de prolonger le dispositif. Dans un communiqué du même jour, les syndicats agricoles FNSEA et JA (favorables au SRP+10) fustigent également le «trimestre anti-inflation». «Nous ne pouvons pas cautionner un dispositif qui va relancer la guerre des prix entre les distributeurs et qui se fera une nouvelle fois au détriment des autres acteurs des filières alimentaires», affirment-ils. Ils ajoutent que l'opération «doit se faire dans le respect de la loi Egalim».
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