L'Oise Agricole 09 septembre 2022 a 15h00 | Par Dominique Lapeyre-Cavé

Une diversification très prenante, mais passionnante !

À 28 ans, Alexandre Boulanger est installé à Antheuil-Portes sur une quinzaine d’hectares depuis mai 2021. Il a développé sur 10 ha une cueillette de fruits et légumes dont la production a démarré fort en cet été 2022.

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Alexandre Boulanger.
Alexandre Boulanger. - © DLC

C’est simple : le jeune homme ne compte plus ses heures depuis son installation grâce aux très bonnes récoltes de légumes de cette année exceptionnelle. Après des études agricoles avec un BTS production végétales puis l’Ihedrea, il a travaillé comme salarié dans un négoce agricole puis sur une exploitation agricole. «Je cherchais à revenir sur l’exploitation familiale dédiée aux grandes cultures avec mon père et mon frère et je voulais créer une diversification pour apporter de la valeur ajoutée. J’ai donc rejoint le groupement des cueillettes Chapeau de paille dont les membres m’ont apporté une aide précieuse pour organiser ma cueillette», reconnaît Alexandre.

Aménagement du site

La première contrainte a été de trouver la parcelle idéale : plate, au bord de la route Compiègne-Roye, avec l’irrigation et suffisamment grande pour accueillir les 4 ha de légumes et fleurs, 2 ha de vergers, 1 ha de fruits rouges, 2.000 m2 de serres ainsi que le parking pour les visiteurs. Le reste des 15 ha reçoit des bandes enherbées et des betteraves sucrières. «On a commencé à préparer la parcelle à l’été 2021, après un blé récolté tardivement en conditions humides. On a épandu du fumier, du compost, enterré l’irrigation en aspersion ou goutte-à-goutte, monté les serres pour les tomates, poivrons, aubergines et concombres, clôturé le site, installé les bâtiments et aménagé le parking. Ensuite, pendant l’hiver, nous avons planté les fruits rouges (fraises, mûres, framboises, groseilles et cassis), la rhubarbe et les arbres fruitiers : pommiers, poiriers, cerisiers et pruniers. Un véritable parcours du combattant pour être prêt au printemps 2022», témoigne le jeune exploitant.

Dès les beaux jours, les semis et plantations sont effectués : choux, épinards, salades, carottes, poireaux, oignons, ail, échalote, haricots verts, fenouil, céleri branche et rave, courgettes, pastèques… une trentaine de légumes et fruits différents s’offrent aux visiteurs. C’est en mai que la cueillette ouvre ses portes, à grand renfort de banderoles installées sur les clôtures, de flyers distribués dans les villages alentours, quelques annonces publicitaires dans la presse locale, un site internet et une page Facebook.

Pour la culture et l’accueil des clients, trois salariés sont mobilisés aux côtés d’Alexandre et de sa compagne qui vient donner un coup de main. «C’est extrêmement consommateur de main-d’œuvre et nous sommes mobilisés continuellement depuis l’ouverture, il y a bien longtemps que je n’ai pas eu le temps de regarder un film à la télé», plaisante Alexandre.

Il a choisi cette cueillette comme diversification car il souhaitait avoir un contact direct avec les consommateurs et, de ce point de vue, il n’est pas déçu. «Je réponds franchement aux questions qui me sont posées, j’explique notre usage très raisonné des produits phytosanitaires car, au niveau du groupement Chapeau de paille, nous visons la certification HVE 3. Nous passons la bineuse, nous paillons, plantons sur toile pour limiter le désherbage et les arrosages.»

Les clients sont souvent des habitués, la cueillette a déjà ses adeptes ; avec l’autoroute A1, ils viennent parfois de région parisienne. Le week-end, ils arrivent en famille. Peu se comportent mal. «Certains consomment sur place, mais globalement, ils sont respectueux des produits. Certains discutent parfois les prix, faisant des comparatifs avec la grande distribution. Mais beaucoup nous font des compliments sur la qualité gustative, la bonne conservation et certaines mamans constatent qu’il est plus facile de faire manger des légumes aux enfants quand ils les ont cueillis eux-mêmes», se réjouit le jeune installé. Il pratique des prix très raisonnables, affichés dès le parking qui a été installé au cœur de la cueillette. Il propose des prix dégressifs en fonction de la quantité, bien utiles pour éviter le gaspillage. Par exemple, cette année, les tomates sont très abondantes et il incite les clients à faire des coulis ou des soupes pour l’hiver. Des fiches recettes sont à disposition et la cueillette des clients est facilitée grâce à des sacs pouvant contenir jusqu’à 10 kg de tomates; des brouettes facilitent le transport des produits jusqu’au coffre des voitures.

Des enseignements

Ce qu’Alexandre Boulanger n’avait pas tout à fait perçu, c’est la dépendance de son activité aux conditions météorologiques. «Pour la croissance des plantes et la maturation des fruits et légumes, c’était évident. Par contre, je n’avais pas perçu à quel point cela peut influencer le comportement des consommateurs. Pendant les fortes chaleurs, la fréquentation a beaucoup baissé et côté cultures, les plantes ont souffert. Et puis on mise beaucoup sur les fraises, produit phare mais très sensible aux fortes chaleurs et à la pluie», admet-il. Il a eu à gérer des chénopodes très envahissants, des lièvres affamés («je crois qu’on les a enfermés dans la parcelle quand on a posé les clôtures») et des doryphores plutôt voraces sur les tiges d’aubergine. Sans compter que les conditions chaudes et sèches ont obligé à irriguer beaucoup la nuit.

Cette première campagne aura été épuisante, que ce soit en termes de production ou de commercialisation. «Je vais faire un peu différemment l’année prochaine en m’organisant mieux, en introduisant de nouveaux légumes et en continuant les fleurs à cueillir qui marchent bien et sont un bel appel visuel. Je ne sais pas dire pour l’instant où j’en suis économiquement, si ce n’est que les charges ont fortement augmenté, que le poste main-d’œuvre est important. J’attends pour faire les comptes, affirme Alexandre. J’ai bien aimé le contact avec les clients, ils viennent aussi pour cela et j’ai pu leur expliquer qu’on peut bien se nourrir à moindre coût.»

Il espère l’arrivée de la pluie mais que septembre et octobre réserveront de belles journées propices au ramassage des courges notamment. Il fermera la cueillette en novembre, mettra son verger cet hiver hors gel pour espérer une première récolte d’ici deux ans. La cueillette d’Antheuil-Portes va vite s’inscrire comme un point fort de vente directe dans le secteur. Chapeau (de paille) !

Les cueillettes Chapeau de paille

Aujourd’hui, le groupement Chapeau de Paille en compte 36. Il accueille des arboriculteurs et des maraîchers candidats à la création d'espaces ouverts à la récolte par le consommateur avec un cahier des charges précis imposant notamment la proposition de fleurs, de fruits et de légumes sur chaque site, le développement d'une agriculture sobre et respectueuse de l'environnement. Les fermes Chapeau de Paille, rassemblées en Groupement d’intérêt économique à but non lucratif, partagent leurs compétences en termes de techniques agricoles ou de pratiques commerciales. www.chapeaudepaille.fr

Infos pratiques

  • Cueillette d’Antheuil-Portes - D 935 / D 568
  • Ouvert de mai à novembre selon conditions météorologiques. 7 jours sur 7, de 9 h 30 à 12 h et de 14 à 19 h, sauf le mardi uniquement de 14 à 19 h.

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