Second pilier de la Pac : la bataille des Régions
A l’écoute des besoins des agriculteurs, les Régions estiment être les mieux placées pour gérer efficacement les fonds du second pilier de la Pac qu’elles abondent de 500 millions d’euros par an depuis 2014.

Pour Régions de France, l’association qui regroupe les Régions en France, une baisse du cofinancement des mesures du second pilier de la Pac après 2021 ne justifie pas une recentralisation de la Politique agricole commune et des aides du second pilier. Depuis 2014, les Régions gèrent 95 % du Feader, soit 1,52 milliard d’euros par an. En incluant leur contribution, le budget agricole atteint 2,32 milliards d’euros par an.
Selon Alain Rousset, président du Conseil régional de Nouvelle Aquitaine, l’Allemagne doit sa force économique à ses Länder et à leurs marges d’actions pour conduire une politique industrielle et agricole audacieuse. «Aussi, la décentralisation du Fonds européen agricole pour le développement rural (Feader) est une ligne rouge dans notre dialogue avec l’Etat. Une recentralisation serait vécue par les Régions comme un casus belli», a annoncé Hervé Morin, président du Conseil régional de Normandie et de Régions de France, lors d’un point presse, en marge du séminaire européen sur la réforme de la Pac post 2020. Il était organisé par la Région Nouvelle Aquitaine et Régions de France, le 13 décembre dernier.
Seule l’efficacité des crédits utilisés prime
Hervé Morin et Alain Rousset ont, du reste, rappelé qu’Emmanuel Macron, président de la République, s’était engagé plusieurs fois devant les représentants des régions à ce que les crédits du Feader soient totalement décentralisés. L’arbitrage est prévu en février prochain. Mais, selon Didier Guillaume, ministre de l’Agriculture, le gouvernement doit pouvoir avoir un droit de regard sur la part des fonds cofinancés qu’il alloue.
En fait, les Régions estiment être mieux traitées à Bruxelles par la Commission européenne (CE) qu’à Paris, par le gouvernement français, selon Hervé Morin. Celle-ci a l’habitude de collaborer avec l’ensemble des collectivités territoriales des pays membres et non pas seulement avec leur gouvernement. «Au niveau des Régions, les politiques conduites anticipent davantage l’évolution économique des territoires, affirme le président de Régions de France. C’est au niveau des Régions qu’éclosent les initiatives et les projets innovants, et la Commission européenne l’a bien compris.»
Mais, pour la FNSEA et JA, la régionalisation des aides du second pilier est distorsive. Pour rendre justement la réforme de la Pac post 2020 applicable dans les régions, sans susciter de distorsions, celles-ci voudraient être associées à Bruxelles, avec le gouvernement français, à l’élaboration du prochain plan stratégique 2021-2027 pour la France. Il serait alors facilement déclinable à l’échelle des Régions pour accompagner les projets agricoles qui leur seront soumis.
Selon Hervé Morin, les soutiens publics ciblés alloués par les Régions pour soutenir des projets d’exploitation sont plus efficaces que les aides surfaciques distribuées à l’échelle nationale. Or, c’est pourtant ce à quoi aboutirait une recentralisation du second pilier, selon Régions de France. Lors du séminaire européen, Alain Rousset a déclaré partager les orientations agro-écologiques et climatiques du projet de réforme de la Pac pour 2020-2027 de la Commission européenne. «Mais la Pac doit garder son caractère ˝commune˝ et minimiser les mécanismes facultatifs pour garder une ligne directrice», affirme-t-il.
Régions de France prend acte que le cadre financier pluriannuel sera défini en octobre 2019, mais elles défendent un budget européen au moins constant pour 2021-2027 et non pas en baisse de 5 %, comme le prévoit la proposition de la Commission européenne. Actuellement, 365 milliards d’euros seraient alloués à l’agriculture, dont 265 milliards d’euros pour le premier pilier et 78,8 milliards d’euros pour le second pilier.
Les Régions font de ce dossier une ligne rouge
«Je n’ai pas mis mon gilet jaune, mais il y en a un stock !», a lancé Alain Rousset, galvanisé par le mouvement qui symbole la rupture entre Paris et le monde rural. «Nous ne voulons pas le pilotage d’une politique que nous ne maîtrisons pas complètement», a insisté Hervé Morin, tout en précisant que «le cadrage restera national puisqu’il y aura un plan stratégique». Il répondait ainsi aux préoccupations de la FNSEA (représenté par Joël Limouzin), des JA (Julien Caillard), mais aussi de la Confédération paysanne (Temanuata Girard), qui craignent des distorsions de concurrence.
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