L'Oise Agricole 11 août 2022 a 09h00 | Par Agrapresse

Les plans de filière à l’épreuve des crises

Remis au gouvernement en 2017, à la fin des États généraux de l’alimentation, les plans de filière fixaient un horizon de montée en gamme à fin 2022. Quelques mois avant l’échéance, qu’en est-il ?

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La loi Egalim 2 a rendu les contrats obligatoires pour les bovins de race à viande en 2022, un an plus tôt que les autres productions. Mais l’interprofession ne communique pas la part de la production sous contrat.
La loi Egalim 2 a rendu les contrats obligatoires pour les bovins de race à viande en 2022, un an plus tôt que les autres productions. Mais l’interprofession ne communique pas la part de la production sous contrat. - © Pixabay

Que sont devenus les plans de filière ? Les différentes interprofessions ont-elles tenu les engagements formulés à la demande du gouvernement en décembre 2017 ? C’est ce que nous avons cherché à savoir en nous concentrant sur quelques objectifs emblématiques. Présentés en conclusion des États généraux de l’alimentation, ces plans fixaient un horizon à fin 2022. Ils matérialisaient l’engagement des filières à jouer le jeu de la montée en gamme, entre autres. Charge aux pouvoirs publics, dans un deal qui n’a toutefois jamais été explicité, de légiférer pour mieux répartir la valeur. Cinq ans, deux lois Egalim et quelques crises plus tard, force est de constater que les résultats sont très inégaux. Le Covid et la guerre en Ukraine sont passés par là, avec leurs lots de turbulences pour la chaîne alimentaire. Difficile de mener des projets structurants quand le bateau tangue... Globalement, les promesses des filières de réduire les phytos et de développer la bio semblent tenues. C’est moins le cas pour le Label rouge, qui semble se heurter à un plafond de verre, notamment en viandes. Des progrès ont aussi été enregistrés du côté de la structuration des filières : en lait ou en porcs, par exemple, la production s’est mieux organisée. Une orientation que les «petites» filières, en revanche, peinent à concrétiser.

Viande bovine : flop en Label rouge, chantier en cours pour les GES

L’objectif de l’interprofession bétail et viandes Interbev était ambitieux : atteindre 40 % de viande bovine Label rouge fin 2022, contre 3 % en 2017. Une cible loin d’être atteinte. Alors que 2 100 magasins sont «référencés dans la démarche» (+ 565 depuis début 2020), «l’évolution du nombre de points de vente engagés reste insuffisante pour atteindre l’objectif», constate Interbev. Les ventes de boeuf Label rouge connaissent pourtant une «dynamique de développement», selon l’interprofession, avec + 17 % de volumes entre 2020 et 2021. Malgré cette progression, «en 2021, la part de l’offre en Label rouge est de 3,3 % en grandes et moyennes surface et en boucheries artisanales».

La contractualisation constituait un autre «axe fort du plan de filière», rappelle l’interprofession, avec un objectif de 30 % de la production de gros bovins contractualisée «en prenant en compte des indicateurs de coûts». Interbev a mis des outils à disposition (guide, modèles de contrats, indicateurs), et rendu obligatoires les contrats pour le Label rouge dès 2019. La loi Egalim 2

a aussi rendu les contrats obligatoires pour les bovins de race à viande en 2022, un an plus tôt que les autres productions. Mais l’interprofession ne communique pas la part de la production sous contrat, indiquant que «vis-à-vis du droit de la concurrence, [elle] n’a pas le droit de récupérer les contrats commerciaux signés».

Sur le plan environnemental, la filière (qui a aussi lancé une démarche RSO) s’était engagée à réduire ses émissions de gaz à effet de serre (GES) de 15 %. Un objectif qui s’appuie sur le programme Life Beef Carbon lancé en 2015. «Dans le cadre du programme, il a été estimé que cet objectif était atteignable si un maximum d’élevages participait au diagnostic» Cap2ER, indique Interbev. Depuis 2015, «6 800 diagnostics Cap2ER ont ainsi été réalisés en élevage allaitant (et 4 500 supplémentaires en élevages mixtes lait/viande).» Selon le dernier recensement de 2020, la France 48 000 exploitations spécialisées en bovins viande.

Céréales : un «plan de transformation» aux objectifs «globalement atteints»

Des objectifs «globalement atteints». Tel est le constat dressé par Intercéréales sur son plan de transformation, avant un bilan plus complet que l’interprofession prévoit en fin d’année. Sur vingt et une actions, quinze sont jugées comme ayant atteint l’objectif. Une seule n’y parvient pas : développer et assurer la couverture des risques pour les agriculteurs et les autres acteurs de la filière. Et pour cause : cette action est «portée en dehors, via la procédure législative», explique Intercéréales. Les cinq res- tantes sont qualifiées de «partiellement atteintes» ou «en cours». Elles concernent en particulier le volet sur la compétitivité de la filière et le revenu des producteurs : baisse des coûts de production, amélioration de la performance de la chaîne logistique. Mais aussi l’innovation en faveur de la transition de la filière : déploiement de solutions alternatives de protection des cultures.

«On promeut le virage vers un ensemble de solutions pour réduire la consommation d’intrants chimiques, notamment les phytos», expliquait Jean-François Loiseau au lancement du plan de filière fin 2017. Là où l’objectif est rempli, c’est dans l’action pour développer le stockage des grains et produits céréaliers sans insecticides : «70 % de la collecte 2021 est sans insecticide de stockage détectable», selon Intercéréales. Même réussite sur l’ambition de doubler les surfaces en agriculture biologique pendant la période 2015-2020. La part du bio en grandes cultures représente désormais 6 % (inférieure aux 10 % toutes productions confondues), souligne l’interprofession. Et de mettre en avant le rôle joué par l’institut technique Arvalis, qui investit en R & D 2,5 millions d’euros par an sur les méthodes culturales et le suivi des récoltes bio.

Lait : la filière accélère pour atteindre ses objectifs de responsabilité sociétale

Outre des réalisations marquantes pour les relations dans la filière (intégration des distributeurs dans l’interprofession, création d’un comité des organisations de producteurs), les professionnels du lait se sont engagés en 2017 à créer une démarche de responsabilité sociétale (RS). Elle prend forme dans le socle «France, Terre de lait» avec huit engagements fixés à l’horizon 2025. Premier enjeu : la juste rémunération des acteurs. «L’indicateur sur le revenu des éleveurs progresse, mais pas aussi rapidement qu’on l’aurait voulu», commente Thierry Geslain, directeur du de veloppement durable au Cniel (interprofession). L’objectif est que 55 % des éleveurs soient en mesure de se rémunérer au-delà du revenu net médian français, soit 1 800 €. C’était le cas de 26 % des éleveurs en 2016, et de près de 40 % en 2020, avec une forte variabilité en fonction des années. Sur le plan sanitaire, la filière a d’ores et déjà coché la case du contrôle systématique des antibiotiques. Chaque livraison doit faire l’objet d’un prélèvement depuis le 1er janvier 2020. Dans le volet climat, la filière vise une diminution de 17 % de l’empreinte carbone des produits laitiers. «On a réussi à casser la courbe des émissions» avec une baisse de 3,2 % entre 2016 et 2019, retient Thierry Geslain. «On est sur la bonne tendance, mais il va falloir accélérer. Les entreprises ont fait beaucoup d’efforts et de plus en plus d’éleveurs sont engagés dans la démarche Ferme laitière bas carbone (32 %, ndlr).»

En ce qui concerne le bien-être animal, la filière s’est engagée à effectuer un diagnostic dans tous les élevages. Une obligation intégrée début 2022 à la charte des bonnes pratiques d’élevage. Sur les questions environnementales et de bien-être animal, les professionnels s’étaient également engagés, dans le cadre du plan de filière, à amplifier le dialogue avec les ONG et les associations de consommateurs. Thierry Geslain le note : «On a engagé des concertations sur l’environnement, la protection animale... On n’en avait pas l’habitude avant.»

Volailles de chair : la «triple crise» freine l’opération reconquête

Reprendre dix points de parts de marché aux importations, en passant de 30 % à 20 % de volailles importées : c’était l’axe central du plan de filière des volailles de chair. Presque cinq ans plus tard, l’objectif n’est pas atteint, en raison notamment d’«un déficit de compétitivité que l’on a du mal à combler», explique Yann Nédélec, directeur de l’interprofession Anvol. Alors que la crise sanitaire avait freiné les importations (40 % de poulet importé en 2020), celles-ci ont repris de plus belle en 2021. Désormais, 45 % du poulet consommé en France provient de l’étranger. «Ce n’est pas faute d’avoir investi dans les abattoirs et dans les élevages pour répondre à la demande», souligne le directeur d’Anvol. Mais les volailles traversent une triple crise qui handicape toute reconquête : flambée de l’aliment et de l’énergie, deux épisodes d’influenza aviaire, puis la guerre en Ukraine. «On ne va pas abandonner notre objectif de reconquête, martèle Yann Nédélec. On y croit encore.» Les crises ont aussi freiné le développement des signes de qualité. En Label rouge – un marché «relativement mature», rappelle le Synalaf –, les mises en place ont progressé de 6 % en 2020 (2021 n’étant pas représentatif pour cause d’influenza aviaire), loin de la cible de + 15 %. En bio par contre, l’objectif de + 50 % est à portée de main, avec une progression de 44 % entre 2017 et 2021 (15,1 millions de volailles bio mises en place). Pour autant, la jeune interprofession – sa création était un des objectifs du plan de filière – a engrangé quelques succès, comme la baisse des antibiotiques de 60 % (par rapport à 2011), et ce, plus tôt que prévu (2025). Anvol déploie aussi ses outils de diagnostic en élevage, Eva (audit complet) et Ebene (bien-être animal). Autant de sujets inclus dans le plan Ambition 2025 d’Anvol, lancé début 2020. Un plan «recentré sur les attentes citoyennes», rappelle M. Nédélec, pour redonner des perspectives à une filière chahutée.

Fruits et légumes : des objectifs environnementaux bien avancés

Dans leur plan de filière commun, l’interprofession des fruits et légumes frais (Interfel) et celle des fruits et légumes transformés (Anifelt) avaient pour objectif d’améliorer la segmentation du marché. D’une part, en atteignant 50 % (en valeur) des fruits et légumes commercialisés engagés dans le dispositif de certification environnementale (niveau 2 ou HVE). «On est dans le tempo», affirme le président d’Interfel Laurent Grandin, faisant écho au constat de l’Anifelt. La réforme de la segmentation passe aussi par le développement de la bio. L’Anifelt a réussi son pari en doublant les surfaces de légumes cultivées en bio, qui passent «de 3 % à 6 %». L’Anifelt est aussi parvenue, dès la fin 2019, à développer son offre de produits français en proposant plus de 1 000 références sous le logo Fruits et légumes de France.

En revanche, Interfel est à mi-chemin de commercialiser 25 % (en valeur) des fruits et légumes frais en bio, et plus largement sous Siqo. «On est autour de 13 %, sachant qu’on a 14 % des surfaces dédiées au bio en France, donc on considère que l’avancée s’est faite», tempère Laurent Grandin.

Les deux interprofessions visaient aussi 20 à 50 % de réduction des phytosanitaires d’ici 2030. Le président d’Interfel estime que, globalement, «le contrat est rempli». «Dans notre filière, 98 % des fruits et légumes sont au dessous du seuil des LMR, et 50 % sont exempts de tout résidu détectable. [...] C’est le fruit d’un travail de recherche constant», rappelle Laurent Grandin. «Je dirais qu’on est à 50 % de l’objectif», estime de son côté le président de l’Anifelt André Bernard, qui regrette l’absence de solutions de biocontrôle pour certains ravageurs. La filière estime aussi avoir fait des progrès en économies d’énergie, gestion des sols et usages de l’eau. En termes de structuration du marché, Interfel visait 30 % de volumes contractualisés. «Nous sommes aux alentours de 15 à 20 % de contrats effectivement faits dans la filière», indique Laurent Grandin, rappelant que la contractualisation n’est pas obligatoire, et «pas forcément adaptée» aux denrées très périssables. Au-delà, les deux interprofessions ont chacune mis au point des indicateurs de coûts de production et des indicateurs de marché.

Porc : nouvelle segmentation en vue, l’export de nouveau sur la table

Dans quelques mois, l’interprofession porcine Inaporc devrait concrétiser la mesure phare de son plan de filière : proposer une nouvelle segmentation en enrichissant la démarche «Le porc français» (LPF). Alors que ce logo garantit uniquement l’origine des animaux et de la viande, l’idée est d’y ajouter des «critères complémentaires de type RSE» pour différencier les produits porcins «made in France» des importations. Le nouveau LPF agglomérera des démarches existantes portant sur la qualité, la traçabilité, l’environnement, le bien-être animal, ou encore les aspects sociaux et sanitaires. «Notre objectif est d’embarquer toute la filière et de faire progresser tout le monde, résume Anne Richard, la directrice d’Inaporc. Nous avons établi la nouvelle grille LPF en 2022. Puis nous allons auditer tous les élevages d’ici fin 2023, avant de communiquer sur la nouvelle grille en 2024.» Ce chantier d’envergure devrait donc être bouclé avec un an de retard sur le calendrier prévu (début 2023). En revanche, les objectifs fixés pour les autres niveaux de segmentation ne seront pas atteints : la filière comptait doubler la production sous Label rouge (à 8 %) et multiplier par dix la bio (à 5 %). En 2021, le Label rouge n’avait pas progressé par rapport à 2017 (4 %).

Quant au porc bio, même s’il se développe, il reste loin de l’objectif (lire encadré). En matière d’antibiotiques par contre, «on a dépassé les objectifs avec une baisse de 55 % en dix ans», souligne Anne Richard. Par ailleurs, la filière va entamer la réflexion sur sa démarche RSE à l’automne. Autre dossier crucial pour la filière porcine : l’export (environ un tiers des débouchés). «Nous allons y retravailler de façon plus structurelle à l’automne», annonce la directrice d’Inaporc. Le plan de filière prévoyait un «plan stratégique export», visant notamment à diversifier les destinations. Premier marché français à l’export, «la Chine a tiré pendant deux ans, ce qui a annihilé tous les travaux de diversification», explique Anne Richard. Cette question se pose à nouveau, alors que «depuis un an, on n’exporte quasiment plus de viande fraîche en Chine».

Vin : avancées sur la réduction des phytos et la réserve, du sur place sur l’installation

Depuis la rédaction de son plan de filière de 2017, le secteur du vin a marqué des avancées sur la réduction des phytos et sur la mise en place de réserves. Mais son point faible est l’installation des jeunes, résume Bernard Farges, président du Cniv (Comité national des interprofessions viticoles). Un des engagements du plan de filière de 2017 était de «réduire de 50 % l’usage des phytos d’ici 2025». «Nous n’arriverons pas à la réduction de 50 %, car ce chiffre magique assemble des choux et des carottes. Il compte, en poids, aussi bien des CMR (cancérigènes, mutagènes, reprotoxiques, ndlr) que des produits lourds comme ceux destinés à la bio et au biocontrôle. Or, l’utilisation de CMR s’effondre.» Cette évolution qualitative transparaît dans les chiffres d’engagement de la filière dans les démarches HVE et bio, étaye Jérôme Despey, président du conseil spécialisé viticole de FranceAgriMer (+ 57 % d’exploitations viticoles certifiées HVE en 2021, + 16 % en bio).

Le plan de filière comporte un engagement «à promouvoir la mise en réserve, y compris dans les ODG (organismes de défense et de gestion) réticents». Cette trajectoire est en train de se concrétiser. «Un grand nombre d’ODG sont en train d’adopter le Volume complémentaire individuel (VCI), tandis que l’Alsace, Bordeaux, le Languedoc et le Sud-Est sont en train de mettre en place leur système de réserve pour la vendange 2022 et que le Val de Loire et la Vallée du Rhône s’y préparent pour 2023», indique Bernard Farges.

Un dossier très actif est le volet de gestion des risques climatiques, a souligné Jérôme Despey, de retour de la conférence des filières sur le sujet le 27 juillet. En revanche, un point «qui n’a pas avancé» est celui du renouvellement des générations, reconnaît le président du Cniv, espérant que la future loi d’orientation s’attellera à la transmission des exploitations viticoles, sur les bases du rapport présenté par le député Éric Girardin (Renaissance, Marne), réélu.

Oléoprotéagineux : le plan protéines comme locomotive

«En route pour le made in France», la filière des oléoprotéagineux estime avoir «quasiment atteint» tous ses points de passage. Terres Univia (interprofession) cite notamment le plan protéines, lancé en décembre 2020 par le ministère de l’Agriculture. C’est un objectif phare du plan de filière, apparaissant dans les trois leviers définis. Exemple avec celui visant à conforter la durabilité des chaînes de valeur et développer une bioéconomie circulaire à bas carbone. Le plan protéines permet de réaliser la diversification des cultures via notamment l’introduction des légumineuses, d’après l’interprofession, qui signale les programmes de l’institut technique Terres Inovia. Une autre réussite indiquée touche au développement d’un projet de spécialisation autour du colza «bas gaz à effet de serre», mené à l’échelle des exploitations (non pas des territoires, comme visé dans le plan). Sur le levier concernant la valorisation du «produit en France», Terres Univia juge la plupart des objectifs réalisés. Il y a notamment la mise en place d’une charte Soja de France. L’interprofession admet connaître «plus de difficultés dans l’accompagnement des transitions». C’est d’ailleurs sur le levier competitivité des chaînes de valeur que la part d’objectifs atteints est la moins élevée. L’un d’eux, certes engagé, vise à assurer la transition protéique et agroécologique des exploitations grâce à des démarches de durabilité. L’action doit encore être renforcée au cours des cinq prochaines années. Reste aussi à finaliser la mise en place de schémas de contractualisation pour l’ensemble des productions.

OEufs : «plus vite et plus loin» sur le bien-être animal

«Notre objectif de 50 % d’oeufs alternatifs [à la cage] prévu pour 2022 a été dépassé en 2019», indique Maxime Chaumet, secrétaire général du CNPO (interprofession des oeufs). Fin 2021, près de 67 % des poules françaises étaient élevées dans des systèmes alternatifs (bio, Label rouge, au sol). «La transition se poursuit», selon le responsable du CNPO, avec désormais une «réflexion sur l’avenir de l’élevage au sol». Ce mode d’élevage (plus de 20 % de la production) est «parfois décrié dans d’autres pays européens», remarque M. Chaumet. La filière française vise donc à «mettre en place un mode d’élevage pérenne», par exemple via des aménagements dans les poulaillers. En matière de bien-être animal, le secteur des oeufs est allé «plus vite et plus loin» que prévu par le plan de filière, affirme M. Chaumet. Alors que ce document prévoyait une simple «réflexion sur l’avenir des élevages de poules pondeuses», les couvoirs vont finalement arrêter toute élimination des poussins mâles d’ici la fin 2022. L’impulsion politique a été déterminante, avec une interdiction gravée dans le marbre réglementaire et des aides aux couvoirs pour investir dans l’ovo-sexage. En ce qui concerne les relations dans la filière, le CNPO s’est élargi comme prévu aux distributeurs, avec la volonté «d’avancer dans les prochains mois» pour intégrer les restaurateurs et les industriels utilisateurs d’ovoproduits. Dans son plan, l’interprofession s’était disposée à «engager un nouveau travail sur la contractualisation» afin de «prolonger le chaînage des contrats de l’amont vers l’aval». Un dossier là aussi bien avancé. D’après Maxime Chaumet, «l’indexation sur l’indice Itavi du prix de l’aliment est présente dans la grande majorité, voire la quasi-totalité des contrats aval» entre les distributeurs et leurs fournisseurs. «On avance même sur les matières premières non agricoles.»

PPAM : une structuration qui tarde à se concrétiser

Dans son plan de filière déposé en 2017, la filière des plantes à parfum, aromatiques et médicinales (PPAM) proposait de se structurer davantage en créant une interprofession unique. Un projet qui tarde à se concrétiser, en raison de la complexité de la filière, divisée en trois sous-secteurs : les plantes à parfums (seule branche à disposer déjà d’une interprofession des huiles essentielles, Cihef) ; les plantes aromatiques – dont certaines font partie de la catégorie des fruits et légumes (thym, safran notamment) ; et les plantes médicinales. «Avant d’avoir une interprofession commune, il faut que chaque secteur se fédère un peu [...] en faisant un premier travail pour savoir quelles plantes peuvent passer [dans son giron] ou pas. Quand tout cela sera calé, on pourra alors trouver un système pour fusionner tout ça», assure Alain Aubanel, président du Cihef et du syndicat PPAM de France.

En revanche, la filière a rempli son objectif d’établir les critères de reconnaissance des organisations de producteurs (OP) pour les secteurs des plantes à parfum et des plantes médicinales, entérinés par décret en septembre 2019. En matière d’agroécologie, la filière «pense avoir atteint» son objectif de stockage de carbone de 4 pour 1 000 sur 20 % des exploitations agricoles. Elle est par ailleurs «en train de rédiger une méthode» afin d’obtenir le label bas carbone, selon le Cihef. En matière d’agriculture biologique, la filière dépasse le cap qu’elle s’était fixé (10 000 ha en production en 2022), avec 11 721 ha (dont 2 674 ha en conversion) dès 2020, selon FranceAgriMer. Sur le plan économique, la filière des PPAM n’a pas réussi à développer la contractualisation. «Il est vraiment difficile à ce jour de parler de contractualisation quand on a des acheteurs qui nous imposent notamment des démarches RSE et qui ne sont même pas capables de les mettre en place, vu qu’ils proposent des prix en dessous des coûts de production», lâche-t-on au Cihef. Enfin, elle est toujours confrontée au manque de financements publics et privés pour financer de la R & D contre les maladies et ravageurs.

Viandes bio : des volumes multipliés par deux en cinq ans

Bovins, porcins, ovins : dans leurs plans de filière, plusieurs interprofessions des viandes visaient un doublement de la production bio. Un objectif «désormais atteint» selon les derniers chiffres de l’Observatoire des viandes bio. «L’offre en viandes bio est ainsi passée de 2 à 4 %», indique l’interprofession bétail et viandes (Interbev) à Agra Presse. En 2021, les abattages de gros bovins bio (laitiers et allaitants) ont représenté 33 303 tonnes équivalent carcasse (téc), sur une production totale de 1,252 Mtéc. Les abattages de veaux bio atteignent 3 483 téc, quand ceux d’ovins bio totalisent 2 199 téc. Quant au porc, 1,2 % de la production est estampillée bio (26 652 téc sur une production totale de plus de 2,2 Mtéc). Un niveau qui reste en deçà de l’objectif du plan de filière (5 % en 2022). Malgré une forte progression des abattages ces dernières années (+ 139 % entre 2017 et 2021), la part de porc bio dans la production plafonne en raison d’un «surcoût très important», explique Anne Richard, la directrice d’Inaporc (interprofession). «Le consommateur est prêt à accepter cette différence pour le jambon, mais pas pour les autres pièces», qui peinent à trouver preneur. Sa conclusion ? «Plus on découpe un animal, plus il est compliqué de faire du bio.»

Betterave et sucre : un plan stratégique a pris le relais

La crise de l’après-quotas a mis le plan de filière betterave-sucre hors course. Face à la chute des prix et aux fermetures d’usines, l’AIBS (interprofession) s’est remise à l’ouvrage en 2019 pour «redonner des perspectives». Un plan stratégique «Betteraves-sucre-bioénergies» a ainsi été lancé. Sa mise en oeuvre est soutenue par l’arrivée d’un délégué interministériel, Henri Havard, en poste depuis septembre 2020. Plus précis en termes d’objectifs, le plan stratégique comprend 52 fiches actions, qui sont autant de «chantiers en cours», indique le directeur de l’AIBS, Thierry Gokelaere.

Le volet amont du plan stratégique vise à renforcer la compétitivité de la culture betteravière. Deux actions phares sont engagées. L’une concerne la lutte contre le charançon, avec l’objectif de dupliquer le programme de recherche et innovation sur le puceron responsable de la jaunisse. L’autre touche à un Instrument de stabilisation du revenu (ISR), dont l’expérimentation démarre l’an prochain avec trois régions du quart nord-est. Pour «la bonne insertion de la France dans les échanges internationaux», le plan ambitionne par ailleurs d’améliorer la logistique. Une expérimentation a été conduite cette année sur des camions de 48 t (au lieu de 44 t) pour le transport de la betterave.

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