Les coopératives laitières réfléchissent à une stratégie export
Les coopératives laitières veulent s’adapter à un contexte international chahuté, marqué par des crises économiques, politiques, sanitaires et environnementales difficiles à anticiper. Parmi les pistes : la diversification des marchés à l’export, la valorisation des savoir-faire et l’innovation pour élaborer des produits exclusifs.

Alors que le renforcement des barrières douanières entre les États-Unis, la Chine et l’Europe risque d’amoindrir la capacité à exporter des opérateurs économiques, les coopératives laitières entendent mobiliser plusieurs leviers pour maintenir leur compétitivité. C’était l’objet des échanges qui ont réuni experts et responsables du secteur du lait à l’occasion des Journées laitières de la Coopération agricole le 10 avril à Paris.
Les taxes décrétées par les États-Unis, les menaces chinoises de droits de douane et la fermeture, sans explication officielle, de l’Algérie aux produits laitiers français, complexifient le travail des exportateurs. «Ces barrières tarifaires à l’accès aux marchés, qui remplacent les embargos du passé, rendent plus difficile la tâche aux pays exportateurs comme la France», constate Jean-Marc Chaumet, économiste au Cniel (interprofession). À cela s’ajoute un renforcement du poids des États qui veulent chacun conquérir leur souveraineté alimentaire pour se mettre à l’abri de crises comme cela a été le cas lors de la pandémie de Covid-19, marquée par la perturbation des chaînes logistiques. «En Chine, depuis trois ans, la sécurité alimentaire fait partie de la sécurité nationale», rappelle Jean-Marc Chaumet. Les États-Unis sont dans la même dynamique, comme l’Europe.
Production stagnante chez les grands exportateurs
Pourtant, la demande en lait est bien présente à l’échelle mondiale, et devrait même croître alors que les grands exportateurs affichent une production stagnante. Entre 2023 et 2024, la consommation mondiale de produits laitiers frais a augmenté de 18 %, celle de beurre de 16 % et celle de fromages de 10 %.
Loin de tourner le dos à l’export, la Coopération laitière préconise de «diversifier et sécuriser les marchés» pour ne pas être dépendant de quelques grands pays qui peuvent prendre des mesures inattendues de protection de leur marché. Il faut prospecter les marchés où la demande est en hausse, comme le Moyen-Orient, l’Asie du Sud-Est, l’Afrique de l’Ouest et l’Amérique latine. L’Asie, l’Afrique et l’Amérique centrale sont déficitaires en termes de production de lait. Autre piste évoquée par l’économiste du Cniel pour mieux commercialiser : tirer parti des accords de libre-échange déjà signés par l’UE et ceux qui pourraient être concrétisés. Le 10 avril, la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, et son homologue des Émirats arabes unis, le Cheikh Mohamed ben Zayed Al Nahyan, ont convenu d’entamer des négociations en vue de conclure un accord de libre-échange. Parmi les produits exportés par l’Europe en 2023, 15 % étaient des produits laitiers (487 M€).
L’innovation pourrait être un «bouclier stratégique», sachant que «les produits innovants plus techniques ou différenciés sont souvent moins substituables et plus difficiles à copier ou à concurrencer», comme le suggère Jean-Marc Chaumet. Autre atout selon la Coopération laitière : valoriser le savoir-faire, notamment en s’appuyant sur des produits avec indication géographique – et donc non substituables.
Toutefois, ces ambitions ne pourront être satisfaites sans soutien public. «Notre capacité à produire et à exporter implique un allègement des contraintes administratives, un soutien adapté aux investissements de transition et un accompagnement fort à l’innovation», a souligné de son côté Pascal Le Brun, président de la Coopération laitière.
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