L'Oise Agricole 04 novembre 2023 a 09h00 | Par Amélie Pâques, Camille Ormancey

Un agriculteur éco-construit une maison résiliente face au changement climatique

Pascal Bourdon, éleveur à Grémévillers dans l'Oise, a suivi il y a quelques années une formation proposée par la Chambre d'agriculture de l'Oise sur la construction d'une maison en paille.

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- © PB

Fortement motivé par le gain de confort lié à une meilleure isolation, mais aussi à diminuer sa consommation énergétique et par idéologie, il a décidé d'éco-construire sa maison d'habitation sous une approche globale, où rien n'a été laissé au hasard.

Frais en été, chaud en hiver et économique !
L'inspiration initiale de l'éleveur a été de construire sa maison avec un maximum de produits agricoles et bon marché. Majoritairement en paille, en bois et en laine de mouton afin que la maison soit la plus écoresponsable possible. De la terre végétale a aussi été utilisée pour réaliser la toiture de la maison.
Les murs extérieurs sont réalisés avec de grands ballots de pailles posés sur des parpaings pour éviter d'humidifier la paille en cas d'une infiltration ou inondation. Les trous entre les ballots sont bouchés avec de la mousse polyuréthane.
Pour Pascal, la paille est d'autant plus intéressante qu'elle est au moins 6 fois plus robuste dans le temps, comparée à la laine de verre qui a une durée de vie d'environ 15 ans.
Concernant la problématique incendie, les murs de paille ont été ignifugés à l'argile ; ainsi, il n'y a pas d'oxygène dans les murs, il est donc impossible pour la paille de prendre feu.
Côté isolation, du polystyrène de 23 cm a été posé sur une bâche pour le sol et pour la toiture, 50 cm de laine de mouton traitée au sel de bore.
À l'intérieur, les enduits ont été réalisés à la chaux et l'ensemble des peintures de la maison avec un mélange de chaux et de lait de vache.
Une toiture végétalisée surplombe l'habitation, mise en place tout d'abord pour son aspect esthétique.
Pascal Bourdon s'est aperçu à l'usage de son pouvoir isolant.
Pour supporter le poids de cette toiture végétalisée d'environ 25 tonnes de terre, les traverses en bois ont été remplacées par des poutres en I en OSB et une ossature bois a été ajoutée.


Une autonomie en eau et électricité recherchée
Pour pouvoir intégrer l'enjeu eau à cette éco-construction, la toiture est composée d'une couche de pouzzolane permettant de préfiltrer l'eau avant qu'elle n'arrive dans deux citernes enterrées de 3 m3.
Par-dessus, a été étalée la terre végétale sur 10 à 12 cm qui, une fois tassée, représente une hauteur entre 8 et 10 cm. L'épaisseur plus importante de terre permet de mieux isoler la toiture face au chaud et d'avoir plus d'humidité.
Par-dessus ont été semées diverses plantes grasses. La végétation ayant un albedo plus important que les toitures goudronnées, cela permet de limiter l'absorption de la chaleur donc de mieux la refléter, et de mieux absorber l'eau.
L'ensemble des eaux de pluies tombant sur la toiture sont récupéré (entre 80 et 100 m3 d'eau par an). Environ 60 m3 sont utilisés pour la maison et le jardin, le restant sert à l'abreuvement des animaux de l'exploitation.
Les eaux sont filtrées plusieurs fois : pouzzolane, filtre grossier, filtre à charbon, filtre céramique et filtre UV. L'ensemble de ces filtres permettent d'assurer une eau potable. Pour l'eau chaude sanitaire, c'est un chauffe-eau thermodynamique qui est utilisé.
La réflexion de Pascal sur cette maison étant globale, le chapitre énergie n'a pas été mis de côté. Le chauffage de la maison est assuré en grande partie grâce à une double baie vitrée à double vitrage exposée Sud.
Chaque fenêtre filtre 40 % du rayonnement lumineux. Il s'agit d'utiliser l'effet de serre se produisant entre les deux baies vitrées. Pour chauffer en hiver, la baie intérieure est laissée légèrement ouverte.
À l'inverse en été, la baie extérieure est laissée ouverte afin d'évacuer la chaleur. Le décalage entre les deux baies est calculé pour que le rayonnement en été n'entre pas à l'intérieur tout en assurant une luminosité suffisante.
Chaque détail compte : le carrelage sombre en granit permet d'absorber la chaleur et de la restituer dans l'habitation grâce à l'inertie du matériau.
La VMC double flux permet de souffler à l'intérieur de la maison un air préalablement réchauffé par l'air intérieur. Bien que la maison soit très bien isolée, un chauffage climatiseur d'appoint a été installé si nécessaire.
L'électricité, quant à, elle vient d'une centrale solaire photovoltaïque de 18 kWc avec onduleur de 15 kW et batteries.
Au total, la maison de 144 m² a coûté environ 100.000 EUR de matériaux, et le garage de 80 m² construit à côté a coûté environ 60.000 EUR. Environ 1/3 du budget a été consacré la centrale solaire photovoltaïque.

Communiquer en se diversifiant
Afin de pouvoir partager son expérience, cet agriculteur constructeur a choisi de diversifier son activité agricole autour de l'hébergement à la ferme, avec des locations courtes ou longue durée aux particuliers.
Fort de ce succès, une nouvelle maison de deux logements est en cours de construction sur l'exploitation. Basée sur le même modèle, elle est cependant composée de petits ballots avec un toit traditionnel.
Pascal est dans le réseau Bienvenue à la ferme, possède une ferme itinérante et est formateur en chien de troupeau. Un bâtiment rénové peut être loué pour des réunions, formations ou tout autres évènements à la ferme.
Toujours dans cette optique de partage, Pascal Bourdon reste disponible gratuitement par téléphone pour toutes les personnes qui auraient des projets similaires.

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