L'Oise Agricole 23 novembre 2023 a 09h00 | Par Pierre Poulain

«Mettre le progrès génétique à la disposition des agriculteurs»

Linéa propose aux agriculteurs une nouvelle culture pour leur assolement : la production de semences de lin textile de printemps. Pour Charles-Henri Biard, responsable développement commercial chez Linéa, elle est mieux adaptée aux climats difficiles et représente une solution agronomique supplémentaire dans les rotations sans pour autant entrer en concurrence avec la culture de lin fibre.

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Afin de répondre à la demande de la filière, Linéa souhaite étendre sa production de semences de lin fibre sur le territoire.
Afin de répondre à la demande de la filière, Linéa souhaite étendre sa production de semences de lin fibre sur le territoire. - © PP

Charles-Henri Biard, responsable développement commercial chez Linéa, GIE de recherche constitué de quatre coopératives linières (Lin2000 (60), Calira (80), Agylin (76) et la Coopérative de teillage de lin du plateau du Neubourg (27)), est sans détour : «En termes de résultats techniques, on aura cette année la pire des récoltes de lin fibre depuis une vingtaine d'années». Après une campagne de récolte 2023 cataclysmique pour les liniculteurs comme pour d'autres cultures de printemps, due à des conditions climatiques éprouvantes, il semble devenu plus que jamais nécessaire aux producteurs de trouver des parades afin de pérenniser la filière. «On a des printemps de plus en plus limitants en eau et depuis plusieurs années maintenant».

Le lin d'hiver fait partie des solutions (voir notre édition du 29 septembre dernier). «La première variété de lin d'hiver date de 2001, mais la culture de LFH a surtout augmenté ces 3 dernières campagnes, notamment à cause des conditions climatiques». Mais il demeure sensible aux gelées hivernales et offre une moins bonne qualité pour la fibre teillée.

Le lin de printemps, plus ancien, reste donc largement majoritaire dans le département et sur le territoire français.

Or, le doute plane sur la capacité de la filière à approvisionner en semences les futures campagnes de production de lin textile, et ce, dès les semis du printemps prochain. «La graine de lin est un co-produit. La plupart du temps, lorsqu'elle l'est au teillage, et n'offre que des rendements très faibles». Dans le même temps, la demande, elle, ne faiblit pas. «La fibre de lin conserve un fort intérêt de part des consommateurs qui regardent de plus en plus la provenance des vêtements qu'ils achètent et leur impact écologique. Or le lin est produit chez nous et nécessite beaucoup moins d'eau que le coton.»

C'est pourquoi Linéa tient à valoriser ses recherches en amélioration génétique. «Si l'on veut continuer à semer du lin de printemps, il faudra avoir à sa disposition des variétés plus tolérantes au stress hydrique. C'est un mot qui recouvre le manque et l'excès d'eau, mais il faut reconnaître que depuis plusieurs années, on est plus dans des phases de manque criant».

Pour «mettre le progrès génétique à la disposition des agriculteurs», Charles-Henri Biard souhaite étendre la culture de semences de lin textile de printemps. «En réservant des surfaces uniquement pour la production de semences, on va augmenter le facteur de multiplication grâce à un itinéraire technique permettant de maximiser la production de graines» explique le chercheur.

L'occasion aussi d'élargir la zone de production puisqu'elle peut se faire dans des zones moins favorables à la production de paille. Là où la culture du lin pour produire de la fibre est exigeante techniquement, demande des investissements dans du matériel spécifique et est réservée aux meilleures terres du territoire, celle de produire des semences de lin textile est beaucoup plus rustique, sans besoin matériel important et peut être réalisée dans presque tous les environnements de Nord et Nord-Ouest de la France. «Nous proposons d'ailleurs à à nos producteurs de gérer nous-mêmes la récolte grâce à un fauchage-andainage puis une récolte dix jours après avec un pick-up adapté». Des semences sont d'ailleurs déjà produites dans le Sud de l'Oise, la Marne ou l'Aube, soit dans des zones beaucoup moins favorables climatiquement où la production de paille de lin textile s'avère souvent impossible ou trop risquée.

Des bienfaits agronomiques et économiques

Pour l'exploitant, c'est une nouvelle culture dans la rotation. Et les bienfaits du lin sont connus. La racine pivotante de la plante, qui descend très profondément, va permettre de restructurer le sol. «En améliorant globalement l'état du sol, la culture suivante, en général une céréale, connaîtra un meilleur rendement». Son couvert végétal dense aide à protéger le sol de l'érosion par le vent et l'eau. On améliore aussi l'état sanitaire et la propreté du champ car son système racinaire permet de concurrencer les mauvaises herbes et de réduire les risques de maladies.

Économiquement, cette culture apporte des marges supérieures à celles des céréales ou du colza. «Nous proposons des contrats intéressants : des forfaits de l'ordre de 2.000 euros à l'hectare. Les semences sont fournies aux agriculteurs et on les aide à obtenir le rendement maximum, situé entre onze et treize quintaux». Si elle ne pourra pas servir à faire du textile, la paille, quant à elle, reste valorisable en fibre totale, en papeterie ou pour la fabrication d'isolants.

Pas de concurrence avec le lin fibre

«L'objectif n'est pas du tout de remplacer le lin pour la fibre mais de proposer du lin dans des zones moins favorables». Les producteurs pourront être des nouveaux liniculteurs ou des anciens, qui faisaient du textile par le passé mais qui n'y arrivent plus, les rendements étant devenus trop faibles. «C'est une alternative afin de continuer à profiter des bienfaits du lin sur l'exploitation. Reste à détenir des terres d'une certaine richesse, qui ne soient pas trop crayeuses. On demande aux agriculteurs un engagement minimum de dix hectares».

Les bienfaits du lin dans la rotation sont connus et celle du lin pour la semence apporte les mêmes bénéfices agronomiques, ainsi que des marges économiques supérieures à celles des céréales ou du colza.
Les bienfaits du lin dans la rotation sont connus et celle du lin pour la semence apporte les mêmes bénéfices agronomiques, ainsi que des marges économiques supérieures à celles des céréales ou du colza. - © linéa
La production de semence est possible dans des zones moins favorables au lin textile pour la fibre.
La production de semence est possible dans des zones moins favorables au lin textile pour la fibre. - © linéa

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