L'Oise Agricole 02 décembre 2022 a 14h00 | Par Actuagri

Les efforts menacés par le prix de l'énergie

À l'occasion d'une visite en Bresse, le 24 novembre dernier, pour montrer le renouveau de ce bassin de production porcine, les représentants Inaporc n'ont pas manqué d'alerter sur les nuages qui planent sur cette filière.

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- © Scott Bauer

En matière de production porcine, la France a des atouts. Même si l'Espagne, depuis quelques années, a ravi la première place, l'hexagone conserve la troisième place, avec 10 % de la production européenne, l'Allemagne se situant au deuxième rang. La France produit 23 millions de porcs charcutiers par an et compte 310 entreprises de salaisons sur son territoire. Historiquement, la production se trouve au nord de la Loire et la transformation au sud, en raison des zones de montagne propices à l'installation des bâtiments de séchage. Particularité de cette filière longue, la viande se consomme «transformée», en charcuterie pour les trois-quarts, un quart seulement étant consommée en frais. La France est auto-suffisante à 105 %. «Mais cette auto-suffisance ne signifie pas que nous produisons tout ce dont nous avons besoin», explique Anne Richard, directrice d'Inaporc, «nous devons importer 25 % de jambons, principalement d'Espagne et nous exportons vers l'Asie des co-produits que nous apprécions moins, comme les oreilles et les pieds, d'où la nécessité de ces échanges.» Le porc, et donc la charcuterie, reste la viande préférée des Français, avec plus de 30 kg par an, devant la volaille et le boeuf, et les ventes se sont consolidées au cours des neuf premiers mois 2022. Les consommateurs plébiscitent la production conventionnelle. La filière bio, qui représente 1,3 % de la production, a des excédents qui représentent un tiers de sa production.

L'exemple de la Bresse

Ce qui attire le consommateur, ce sont les particularités locales. Les «charcuteries de pays», qui donnent ce sentiment de vivre un «Tour de France». Car chaque région a ses savoir-faire. Dans le département de l'Ain, où Marc Berger, directeur de l'entreprise centenaire «La Bresse», explique pourquoi il parie sur «le patrimoine charcutier bressan gourmand» pour relancer une filière locale. Dans le monde du cochon, la Bresse est une «petite Bretagne». La production porcine a une histoire. Elle est née à la ferme où l'on récupérait le petit lait des fromageries, les restes des usines de pain voisines et un peu de tourteaux pour fabriquer l'aliment pour nourrir les porcs. Adossée à la coopérative Agrial depuis trois ans, l'entreprise de salaisons «La Bresse» veut aujourd'hui mieux transformer les porcs charcutiers de ses adhérents et les valoriser sous forme de ces produits anciens mais plus que jamais demandés, jambons persillés, Civier bressan, saucissons à cuire.

Le cahier des charges de cette toute nouvelle filière s'appuie sur le bien-être animal et l'économie circulaire. La Ferme de Montburon, à Confrançon, est la première à entrer dans ce circuit «Porc De Bresse». L'élevage de 380 truies produit plus de 10 000 porcs charcutiers par an, sous le label «Porc Français», nés, élevés, abattus et transformés en France. Mais au-delà, les deux exploitants, Jean-Vincent Chapaton et son beau-frère Alexis Pugliese, ont investi 800 000 EUR pour 96 places d'une «maternité bien-être». Deux milles places d'engraissement ont aussi été créées. Au total, ce sont 2,6 millions d'euros que les deux exploitants ont investi. L'épandage des lisiers s'effectue sur 450 hectares d'agriculteurs voisins. Un produit recherché d'ailleurs du fait de l'explosion du prix des engrais. À l'avenir, les deux éleveurs comptent trouver 130 hectares pour produire 40 % de leur aliment. Mais avec un tel investissement, ils ont toujours les yeux rivés sur les cours du Marché du porc breton, dont 70 % de leur production dépend, le reste étant acheté par leur coopérative au coût de production. Cette année, avec un chiffre d'affaires de 1,2 million d'euros, ils accusent une perte de 220 000 EUR.

Au bord de la rupture

Malgré ces efforts, la filière porcine traverse une crise inédite en raison de l'augmentation des coûts de l'aliment et de l'énergie. Le prix de l'électricité pourrait être multiplié par huit pour certains contrats. Dans le même temps, les cours du porc sont en baisse. Le plan d'aide proposé par les pouvoirs publics n'est plus à la hauteur. Le président de la Fédération nationale (FNP), François Valy, s'inquiète de la pérennité de nombreux élevages. La production pourrait chuter de 3 % en 2022 et les importations ont déjà progressé de 6 % depuis janvier. Pour lui «il faut être un kamikaze pour monter un élevage de porcs aujourd'hui. Je suis assez pessimiste sur le développement de la filière».

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