Léger déficit et régionalisation en pause pour la Chambre
La dernière session de l’année était consacrée au vote du budget initial 2022, à un point sur la moisson 2021 et à l’actualité de la Chambre d’agriculture de l’Oise.

Le budget de fonctionnement prévisionnel, à hauteur de 5,6 millions d’euros, se soldera par un léger déficit de 283.000 euros, dû à une baisse des prestations de services. Côté budget investissement, les dépenses sont prévues à la baisse. Au global, le déficit sera équilibré par prélèvement sur le fonds de roulement, qui s’élèvera à 91 jours de fonctionnement. Ce prévisionnel sera amélioré en recherchant des économies de charges et en améliorant le produit des prestations de service.
«Notre baisse des prestations de service s’explique par la forte implication dans le processus de régionalisation qui a mobilisé beaucoup d’énergies. Les quatre Chambres concernées, Nord-Pas de Calais, Aisne et Oise, n’ont pas trouvé un mode de fonctionnement régional partagé et je pense qu’il nous faire une pause. Notre projet politique s’est heurté à une réalité financière», regrette Hervé Ancellin, président de la Chambre. Il propose de faire réaliser des audits dans les cinq départements pour avoir un œil extérieur sur les fonctionnements, les organisations et les finances, une façon de prendre du recul pour ensuite reprendre le processus, sous la pression du ministère de l’Agriculture.
Méthanisation
Simon Inglard, de la Confédération paysanne, a proposé le vote d’une motion nationale du syndicat, «pour stopper les dérives de la méthanisation». Y sont notamment évoqués les concurrences entre usages alimentaires et énergétiques, le détournement des ressources fourragères, l’absence d’étude sur les conséquences agronomiques de l’épandage du digestat. Ce constat n’a pas manqué de faire réagir dans la salle, les uns partageant certains points, les autres étant en exacte opposition. Hans Dekkers, en plein projet de méthanisation sur son exploitation, réfute point par point la motion, «sans base scientifique». Hervé Ancellin rappelle qu’une charte sur la méthanisation est en cours de rédaction concertée. La méthanisation, sans doute un sujet et un débat à organiser pour une prochaine session de la Chambre d’agriculture.
Avancées
Il a aussi été question du canal Seine Nord Europe qui avance sur le secteur 1, entre Choisy-au-Bac et Passel. Se pose néanmoins la question des dépôts de terre provisoires ou définitifs et des DPB (droits à paiement de base) que les exploitants aimeraient pouvoir récupérer à l’issue du chantier. De même, dans le cadre de la reconstitution de la valeur ajoutée sur le territoire, Bernadette Bréhon plaide pour la création de réserves d’eau en hiver qui pourraient servir à des projets de diversification et pour la construction d’un abattoir nécessaire au maintien de l’élevage et répondant à l’attente des éleveurs en vente directe.
L’occasion pour le président Hervé Ancellin de plaider pour la réflexion et la mise en œuvre d’un schéma départemental de l’eau, par exemple pour stocker de l’eau l’hiver pour limiter les effets des sécheresses estivales. «L’eau sera un facteur déterminant pour l’agriculture de demain et la Chambre d’agriculture compte sur le Conseil départemental pour l’aider à aboutir sur ce projet.»
Une initiative reçue avec bienveillance par Sébastien Lime, secrétaire général de la préfecture, qui rappelle que les services de l’État sont attentifs aux dossiers concernant l’eau, la méthanisation et sa charte en cours ainsi qu’à celui de l’artificialisation des sols.
Une bonne année 2021 dont les résultats ne se traduisent pas dans les trésoreries
Oriane Carrié et Pierre Delassus, conseillers de gestion à AS 60-ACG, et Hervé Vandierendonck, en charge de l’agriculture au Crédit Agricole Brie Picardie, ont présenté les résultats post-moisson 2021. D’abord en grandes cultures où l’on constate une baisse de la sole de colza au bénéfice du tournesol, du soja et du lupin. Les rendements 2021 ont été supérieurs à la moyenne olympique des cinq dernières années. L’année a globalement été bonne et les prix ont subi une forte hausse, excepté pour la betterave sucrière dont la place dans les assolements est plus motivée par des aspects agronomiques qu’économiques.
Le ratio excédent brut d’exploitation (EBE) sur produit brut atteint 35 %, au delà du seuil de rentabilité estimé à 30 %. Malgré des annuités importantes, la trésorerie des exploitations s’améliore, mais les hausses de charges en cours, notamment les engrais et les carburants, vont réduire l’impact positif de ces résultats sur 2022.
Pour les exploitations de polyculture-élevage, malgré une légère amélioration du prix du lait et à cause de l’impact du Covid sur la viande, ce sont les aides et subventions qui permettent de couvrir les charges. Le rapport EBE/produit brut n’est que de 22 %, mais la capacité d’autofinancement sera positive en 2021. L’endettement global baisse de 10 %, mais les dettes court terme sont en hausse de 2 %, à cause des coûts de l’alimentation en forte augmentation, d’où la nécessité de travailler sur l’autonomie alimentaire des élevages.
Côté banquier, si l’accompagnement court terme a baissé de 4 % en juin, il a augmenté en même proportion en octobre, ce qui fait dire que le bénéfice de la bonne moisson 2021 ne s’est pas traduit dans les trésoreries. Par contre, les investissements sont en hausse de 12 % sur les trois départements (60, 77, 80) de la caisse, mais de 18 % dans l’Oise. Les prêts Agilor augmentent de 24 % alors que ceux liés aux projets de méthanisation sont en baisse. Sur les 10 premiers mois de 2021, 48 emprunts pour des achats de moissonneuses-batteuses et 152 pour des tracteurs ont été déposés, signe que les agriculteurs réinvestissent à nouveau dans le matériel. Le banquier note une accélération de la concentration des structures et une complexification des modèles des exploitations agricoles, au nombre de 47 maintenant selon la nomenclature bancaire. Les projets à financer sont très diversifiés : start-up, nouvelles productions...
Enfin, sont appréciés des critères d’indépendance financière (fonds propres/capital), d’efficacité financière (EBE/produit brut), de capacité à financer le cycle de production (dettes court terme/produit brut ou fonds de roulement/charges) et dette bancaire (encours prêts long et moyen terme/EBE). 87 % des 1.600 exploitations de l’Oise et de l’Eure suivies par le Crédit agricole Brie Picardie n’ont aucun ou un seul critère de fragilité. 2 % ont les 4 indicateurs au rouge, souvent de petits élevages laitiers, où la fatigue et la solitude se font sentir.

Une motion en décalage
Depuis des années, on subit l’agribashing, la stigmatisation sur des productions comme l’élevage, décrié par des associations type L. 214. On se bat pour rétablir des vérités sur nos pratiques trop souvent méconnues.
Mon ressenti, lors de cette session Chambre, est la stupéfaction et l’écœurement quand je vois qu’au sein d’une même profession, nous pouvons être dans des positions si divergentes. Comment peut-on stigmatiser une diversification comme la méthanisation en brandissant des arguments infondés, des mensonges ? Comment peut-on affirmer que la méthanisation sera la responsable des prochaines problématiques de la gestion en ressource en eau ? Comment peut-on affirmer que les cultures dédiées aux surfaces énergétiques contribueront à la disparition des prairies alors qu’au même moment, l’Oise est soumise une nouvelle fois au régime d’autorisation de retournement des prairies? N’est-ce pas plutôt une question de considération, et avant tout de rémunération des produits issus de l’élevage ?
Et une majorité de projets de méthanisation dans l’Oise sont des projets collectifs, dont font partie des éleveurs. Comment peut-on affirmer que l’usage intensif des parcelles entraînera l’infertilité des sols ? Désolé, mais l’agriculture conventionnelle a toute sa place, sans être un danger pour l’environnement, contrairement à ce qui est affirmé par certains syndicats !
Je suis éleveur et je cherche à avoir des cultures intermédiaires pour avoir une autonomie alimentaire et en protéine. Comment peut-on affirmer que la méthanisation entraîne un agrandissement excessif et un prix du foncier élevé ? Mais chers amis, ne cherchons pas un bouc émissaire ! Le prix du foncier est une problématique depuis des années, quel que soit le territoire ! Comment peut-on affirmer que les prix actuels du maïs ensilage et des pulpes sont élevés du fait de la présence de méthaniseurs ? À la FDSEA, nous avons travaillé le dossier pulpes cet été pour en assurer la disponibilité aux éleveurs ! Le prix de la pulpe fait partie des prix payés aux betteraviers et celui du maïs ensilage est aussi corrélé au prix du maïs grain !
Oui, un syndicat minoritaire a déposé en session une motion soutenue par l’autre syndicat minoritaire, décriant la méthanisation, demandant plus de contrôles et de sanctions. J’appelle ces responsables à aller enfin sur le terrain, rencontrer des porteurs projets de méthanisation ! Nous le faisons et nous voyons aussi des hommes derrière ces projets, des installations de jeunes. Nous n’avons pas attendu la motion de ces donneurs de leçons pour travailler sur certains craintes comme le transport, la disponibilité des produits...
En tant que représentants de la FDSEA, nous sommes vigilants quant à la disponibilité des cultures, des aliments pour chaque production. Nous devons tous pouvoir vivre et mener nos productions au mieux. Comme toute production, la méthanisation est réglementée. Nous sommes un syndicat responsable et si des règles devaient être enfreintes, nous saurions prendre nos responsabilités et agir en conséquence.
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