L'Oise Agricole 08 août 2024 a 07h00 | Par Dominique Lapeyre-Cavé

«Le collectif pour passer le cap de cette moisson et donner une vision à l'agriculture»

Le président de la FNSEA est venu dans l'Oise au chevet des agriculteurs qui subissent une mauvaise moisson. Avec lui, Xavier Bertrand, président de la Région, Marie-Sophie Lesne et Denis Pype, conseillers régionaux, Julien Dive, député de l'Aisne, et Catherine Séguin, préfète de l'Oise.

Abonnez-vous Reagir Imprimer
- © Pierre Poulain

Pour l'occasion, représentants FDSEA mais aussi JA, Crédit agricole Brie-Picardie, MSA, Chambre d'agriculture, FRSEA et élus locaux avaient rendez-vous à Mureaumont, chez Julien Degry, jeune éleveur laitier. Son maïs a été touché par un gros orage dans la nuit du mardi 30 au mercredi 31 juillet. Les bourrasques à 104 km/h et les 41 mm de précipitations ont cassé des tiges pas encore en floraison, qui ne produiront donc rien. «Je ne pourrais pas ensiler», se désole Julien Degry, qui n'est pas assuré. «Même si je l'avais été, la perte ne serait sans doute pas assez importante pour déclencher.»
Régis Desrumaux, président de la FDSEA, au delà de cet exemple malheureusement pas isolé, rappelle l'objectif de la rencontre : alerter rapidement sur la moisson 2024 catastrophique dans certains secteurs, sur les inondations récurrentes dans le Noyonnais et sur les derniers gros orages. État, collectivités et partenaires sont invités pour prendre la mesure de la situation et trouver ensemble des solutions. «Au delà de l'aspect financier, les inquiétudes sont fortes et le moral des agriculteurs en berne», avance le président de la FDSEA.
Parmi les agriculteurs présents, certains craignent que cette moisson ne décourage les jeunes à s'installer ou handicape pour plusieurs années ceux qui viennent de franchir le pas, d'autres se désolent du système assurantiel actuel limité, de règles fiscales trop strictes qui empêchent de mettre de côté les bonnes années sans fiscalisation pour avoir de la réserve en cas de mauvaise récolte ; tous notent la formidable hausse des charges qui plombe les résultats des exploitations.
«Après notre mobilisation de début d'année, nous attendions mieux en terme de simplification et d'application de la loi Egalim. De la souplesse dans les règles, nous en avons particulièrement besoin cette année, plaide Luc Smessaert. Les attentes vis-à-vis de la LOA (loi d'orientation agricole) étaient fortes.» Le député Julien Dive (LR) en profite pour rappeler qu'il travaille à un nouveau texte plus complet, prenant en compte une vraie vision de l'agriculture avec un volet sur les investissements, sur les haies, mais aussi sur des adaptations départementales, par exemple sur les dates de semis.

Les attentes de la FNSEA
Arnaud Rousseau affirme que de nombreux départements font une mauvaise moisson et que les intempéries ont touché beaucoup de régions. «À court terme, comment financer la prochaine campagne ? Il faudra dégager des marges de manoeuvre auprès du secteur public, de nos OPA partenaires, mais les agriculteurs devront aussi prendre leur part en tant que chefs d'entreprise», pose d'emblée le président de la FNSEA. Des fonds (450 MEUR) peuvent être activés au niveau européen en cas de crise, mais les instances européennes se mettent juste en place suite aux élections. «Le dossier pourrait être monté par la France d'ici octobre.» Au niveau de la France, selon Arnaud Rousseau, l'État et les collectivités peuvent apporter leur soutien, par exemple au travers de mesures fiscales et sociales.
Les OPA partenaires ont été sollicitées par la FNSEA et notamment le Crédit agricole ou d'autres banques : pause, report en fin de tableau... sont des solutions, mais qui ont un coût. «Nous pensons que ce coût doit être partagé en trois : État, banques et agriculteurs. Mais avant, il faut déjà le chiffrer, c'est en cours.»
«De même, 2024 nous permettra de voir si notre système assurantiel est robuste. Toutes les pertes ne pourront pas bien entendu être prises en charge par les assurances, mais nous espérons que ces dernières ne finasseront pas dans l'examen des dossiers.»
Enfin, sur le moyen et le long terme, ce que la FNSEA attend, c'est une vision de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire. Quelle compétitivité de notre agriculture ? quelles normes ? «Oui à la construction du prix en avant, le prix plancher, c'est du vent, cela ne fonctionne qu'en économie fermée, ce qui n'est pas notre cas. Nous ne pouvons plus rester sans réponse, nous attendons d'avoir un interlocuteur et cela tarde. Nous sommes prêts à travailler avec les services de l'État car c'est dans le collectif que nous trouverons les réponses à nos problèmes. Nous avons obtenu quelques avancées en début d'année, mais il en faut plus. Je sais bien que nous n'aurons pas de stabilité politique dans les deux ans à venir, mais nous ferons valoir notre vision de l'agriculture», plaide Arnaud Rousseau.
En réponse, Catherine Séguin, préfète de l'Oise, se veut rassurante. L'État est très vigilant sur la situation agricole et des mesures peuvent être mises en place rapidement comme le dégrèvement de la taxe sur le foncier non bâti, à 100 % pour les prairies permanentes et sur les zones reconnues en calamités agricoles. Elle assure que le baromètre de la simplification administrative, sur 70 engagements, affiche 67 % de réalisations. Elle plaide également pour une réflexion collective pour permettre à l'agriculture de s'adapter au changement climatique et d'être plus résiliente.

- © Pierre Poulain

La lenteur des dossiers PCAE et PréAd expliquée
Face aux remarques que lui ont adressées Romain Petit et Mickaël Mos, pour qui «cet outil est formidable pour aider l'agriculture à se développer, mais dont les démarches trop longues ou les paiements jamais effectués en ont plombé plus d'un», le président Bertrand s'est emporté. Cela fait trois ans que la Région est devenue l'autorité de gestion régionale du Feader, «mais avec des règles de fonctionnement que je n'ai pas choisies et que je subis également», tonne-t-il. Beaucoup de dossiers installations et PCAE passés à la Région, puis de nombreux autres déposés, soit une somme de demandes à traiter très importante. Les services de la Région n'ont pas chômé et dès les demandes validées, un délai de 30 jours s'ouvre pour le paiement. C'est là que les choses semblent bloquer. Le président rappelle que le dépôt d'une demande complète ne garantit en rien l'attribution d'une subvention. Les projets individuels sont soumis à une grille de sélection qui permet de déterminer leur éligibilité et leur priorité. Ils sont retenus en fonction de la complétude, de l'éligibilité et de la note (jusqu'à épuisement de l'enveloppe).
Xavier Bertrand serait prêt à avancer les sommes puis à les récupérer ensuite, mais c'est impossible, d'où les nombreux retards ou déceptions. Il refuse de se faire reprocher des disfonctionnements dont il affirme ne pas être responsable.
D'ailleurs, Marie-Sophie Lesne indique que la Région s'est dotée d'un nouveau logiciel de gestion des demandes qui devrait être plus efficace en diminuant le délai de traitement des dossiers. Le budget pour le nouveau programme devrait être augmenté, ce qui est rassurant.

Réagissez à cet article

Attention, vous devez être connecté en tant que
membre du site pour saisir un commentaire.

Connectez-vous Créez un compte ou

Les opinions emises par les internautes n'engagent que leurs auteurs. L'Oise Agricole se reserve le droit de suspendre ou d'interrompre la diffusion de tout commentaire dont le contenu serait susceptible de porter atteinte aux tiers ou d'enfreindre les lois et reglements en vigueur, et decline toute responsabilite quant aux opinions emises,

A LA UNE DANS LES REGIONS

    » voir toutes 1 unes regionales aujourd'hui