La préfète à la rencontre et à l'écoute des agriculteurs de l'Oise
À l'initiative de JA 60, la préfète de l'Oise, Catherine Seguin, a visité une exploitation de polyculture-élevage laitier. L'occasion pour les responsables syndicaux JA, mais aussi FDSEA, Chambre d'agriculture et élus locaux de faire part des réussites et difficultés de l'agriculture de l'Oise.
Les membres des conseils d'administration des structures syndicales JA et FDSEA avaient été conviés et ce sont pas moins d'une trentaine agriculteurs qui ont accueilli la préfète, Catherine Seguin, ainsi que des représentants de la DDT, Claude Soullier et Agnès Cochu.
Récemment nommée dans le département, cette visite était une première pour la représentante de l'État et elle s'est montrée très à l'écoute des agriculteurs, n'hésitant pas demander des précisions, prenant des notes et invitant, dès le début de la rencontre, ses interlocuteurs à prendre le temps nécessaire pour évoquer les dossiers à l'ordre du jour. Puisque les JA étaient à l'initiative de l'événement, leur présidente, Gwenaëlle Desrumaux, a présenté les chiffres remarquables de l'installation en 2022 dans l'Oise : 50 installés contre 30 habituellement, la moitié en élevage, 30 % en grandes cultures, 3 % en maraîchage, le reste en diversification diverse. Elle a pointé de faute de revenus suffisants. La double activité est souvent pratiquée par les jeunes et surtout l'arrêt de l'élevage quand les parents prennent leur retraite. La présidente a souhaité la bienvenue dans l'Oise à Catherine Seguin en lui offrant le devenu culte calendrier des JA.
C'est Matthieu Carpentier, jeune agriculteur installé en élevage laitier à Pierrefitte-en-Beauvaisis et hôte de cet échange, qui a entamé l'après-midi. Dans un premier temps, il a présenté son exploitation (211 ha, grandes cultures et surtout atelier laitier avec une production de plus de 700.000 litres de lait), puis fait part de ses difficultés : «Quand je me suis installé, mon père ne croyait pas que je maintiendrai la production laitière. J'ai amélioré les bâtiments grâce à un PCAE, mais ce qui me tracasse aujourd'hui, c'est de savoir si je vais avoir suffisamment de fourrages pour assurer la production. Certes, le prix du lait a été revalorisé mais cette hausse ne couvre pas celle des charges.» Le jeune agriculteur a abandonné les betteraves sucrières qui lui permettaient d'obtenir de la pulpe, mais pas assez, et les a remplacées par des fourragères. Malgré des achats d'herbe et une récolte 2021 qui lui a assuré de l'avance, il a déjà presque fini un silo d'ensilage de maïs qu'il n'entame généralement que début avril. «Si la sécheresse persiste, je n'aurais rien à donner à mes vaches début juillet et je devrais vendre des animaux», s'inquiète-t-il. L'occasion pour les responsables FDSEA, Pascal Foucault et Régis Desrumaux, de pointer le problème du non retournement des pâtures et notamment le ration dont ils contestent la méthode de calcul. «Sont prises en compte dans les hectares retournés les pâtures à proximité des villages qui sont urbanisées ; c'est injuste et nous avons déposé un recours gracieux auprès du préfet de Région», plaident-ils.
Alice Avisse, responsable viande, a plaidé pour une meilleure application de la loi Egalim qui oblige éleveurs et acheteurs à signer des contrats avec des prix et une référence au coût de revient. Cette démarche, toute nouvelle dans cette activité, a du mal à s'implanter auprès de tous les acteurs, parfois auprès des éleveurs mêmes. C'est vrai que l'embellie des cours n'incite pas à l'engagement, mais la responsable rappelle que les cours actuels ne compensent pas la hausse des charges et restent en deçà des coûts de revient. Catherine Seguin souhaite savoir si l'absence de signature de contrats est généralisée, tous répondent que oui. La décapitalisation est importante depuis plusieurs années et il y a du souci à se faire quant au maintien de l'élevage, et donc des prairies, dans l'Oise.
D'autant plus que, comme le pointe Hélène Beaudoin, responsable élevage de la Chambre d'agriculture, l'importation de viandes étrangères sert souvent de monnaie d'échange lors de la signature de grands accords commerciaux. Ainsi, la France a obtenu du Chili qu'il lui fournisse du lithium, indispensable à la production de batteries, mais ce dernier a imposé l'achat de viande bovine produite dans des conditions incontrôlables et bien éloignées des standards français, «une véritable distorsion de concurrence.»
Dégâts de gibier et productions végétales
Comme la problématique des dégâts de gibier ne cesse d'amplifier, il était légitime de pousser le dossier devant la préfète : des indemnisation sangliers en hausse (1.265 ha détruits en 2022 contre 965 en 2021), payées par la Fédération des chasseurs et par l'État, mais aussi des conséquences indirectes et non indemnisées comme la casse de matériels, des prairies devenues improductives car labourées par les sangliers... Les agriculteurs demandent à ce que tout soit mis en oeuvre pour diminuer les populations de sangliers car il semble que certains chasseurs ne soient pas assidus pour tirer sur des laies suitées. Même remarque sur les cervidés qui causent des dégâts toujours plus importants, sans oublier corbeaux, blaireaux et pigeons devenus des fléaux.
Côté grandes cultures, malgré de bonnes années et des prix à la hausse, l'inquiétude est forte : le prix de l'engrais a été multiplié par trois et le cours du blé est actuellement en chute libre. Adrien Dupuy, responsable section grandes cultures, insiste sur la vocation exportatrice de la France. «Avec des coûts de production actuellement au niveau des prix de vente, l'effet ciseaux est bel et bien là. Sans compter les retraits de matières actives sans alternatives satisfaisantes. Face aux normes, à la réglementation contraignante et à la pression des contrôles, beaucoup de céréaliers se disent démotivés», témoigne-t-il. Simon Muller, responsable agriculture biologique, rebondit sur le désarroi des producteurs déjà convertis dont il faut assurer le maintien plutôt que vouloir augmenter le nombre de conversion, alors que les consommateurs peinent à s'y retrouver devant les nombreux labels existants. «Peut-être faut-il simplement baisser la TVA sur les produits bio pour faciliter le marché et ainsi assurer un soutien fort», suggère-t-il.
Enfin, le sujet de l'eau a été évoqué par Rémi Minart et Catherine Seguin a averti que vu la hauteur actuelle de la ressource, un arrêté cadre va être pris dès mars avec 14 secteurs en alerte. Elle invite d'ailleurs les agriculteurs à anticiper dans la mesure du possible un été qui risque d'être difficile. Enfin, elle a indiqué souhaiter rencontrer régulièrement les responsables sur les dossiers pour prendre les bonnes décisions.
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