«L'isolement est le frein majeur pour l'accès aux dispositifs d'aides»
La mauvaise récolte de cet été et la propagation du virus de la fièvre catarrhale ont incité la MSA Picardie à diffuser depuis quelques semaines dans les départements de l'Aisne, l'Oise et la Somme, un fascicule «Le dispositif crises agricoles», qui rappelle tous les accompagnements proposés par la Mutualité sociale agricole pour surmonter les périodes difficiles. Éric Aernoudts, directeur adjoint, et Ingrid Desort, responsable du service cotisations et recouvrement, font le point.
Quel est l'objectif de ce dispositif ?
Ingrid Desort : Le dispositif s'inscrit dans un cadre national décliné au niveau local. C'est un accompagnement pérenne, que le chef d'exploitation peut actionner tout au long de l'année, pas seulement en temps de crise, en cas de difficultés financières ou de situation de mal-être. L'actuelle épidémie de FCO qui touche de plein fouet les cheptels picards génère justement du mal-être chez nos éleveurs attachés à leurs bêtes, et aura des répercussions sur l'exercice financier de 2025. C'est donc le moment pour la MSA, souvent identifiée comme un organisme taxateur, de montrer qu'elle vient aussi au soutien des agriculteurs.
Quels sont les accompagnements proposés ?
Ingrid Desort : L'exploitant peut demander un plan de paiement, c'est-à-dire le paiement de sa facture en plusieurs fois et selon les périodicités de remboursement les plus adaptées à la gestion de sa trésorerie. Les demandes d'échéanciers de paiements ont déjà augmenté de 60 % l'an passé en Picardie. L'agriculteur s'engage à payer ses échéances aux dates convenues mais également à régler ses cotisations dites courantes dans les délais. S'il est employeur de main-d'oeuvre, il a l'obligation de payer les parts ouvrières avant la mise en place de la première échéance de son plan de paiement. Les caisses MSA disposent également d'un fonds pour alléger le montant des cotisations sociales dans la limite des 3.800 EUR annuels. Cette prise en charge partielle reste peu connue. Le fait de devoir fournir des documents comptables pour valider le dossier peut en effrayer certains. Elle est pourtant une solution en cas de problèmes de trésorerie. Pour bénéficier d'une prise en charge partielle en 2024, le dossier de demande est en ligne et doit être retourné avant le 31 octobre. L'accompagnement au paiement des cotisations passe également par l'optimisation des appels de cotisations et la possibilité de modifier l'assiette des revenus professionnels pris en compte pour le calcul des cotisations : passer à une assiette triennale ou solliciter le passage en option N-1 peut permettre d'adapter le montant des cotisations réclamées en fonction du contexte économique. Il est néanmoins conseillé de s'informer auprès d'un comptable avant de changer d'option, ce choix engageant l'agriculteur pour 5 ans. Le choix de l'option doit être formulée avant le 30 novembre pour un effet au 1er janvier 2025.
Pourquoi la population agricole semble si peu s'approprier l'ensemble de ces accompagnements ?
Eric Aernoudts : L'exploitant est un chef d'entreprise. Il tire ses ressources de son travail et toute son énergie y est consacrée. Il a l'habitude des aléas et espère que le prochain exercice sera meilleur plutôt que de s'engager dans des démarches administratives. Ceux qui se retrouvent vraiment en difficulté ne bénéficient bien souvent plus des meilleurs conseils, aggravent leurs problèmes et s'isolent. Nos métiers valorisent la qualité du travail, les choix culturaux sont personnels, il y a de la fierté, les héritiers sont porteurs d'une tradition et, face aux grandes difficultés, on se demande si on est un incapable et on s'isole. Or, l'isolement est le frein majeur pour l'accès aux dispositifs d'aides. C'est pourquoi la MSA Picardie privilégie «l'aller vers», c'est-à-dire présenter à la population agricole les dispositifs de soutien existants, répondre aux interpellations et avoir une relation de qualité avec les différentes OPA. Que l'agriculteur ne reste pas seul, qu'il ait toujours un interlocuteur, que quelqu'un entrouvre la porte. C'est d'ailleurs l'esprit qui anime aussi le réseau «Sentinelles», plus d'une centaine de personnes dans la région, de divers horizons, formées à détecter ceux qui sont en situation de mal-être et à les orienter.
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