L'Oise Agricole 16 novembre 2023 a 07h00 | Par Pierre Poulain

«L'agriculture ne doit pas devenir une citadelle assiégée»

La journée de l'adhérent FDSEA Oise s'est tenue ce lundi 13 novembre à Beauvais, en présence du président de la FNSEA, Arnaud Rousseau. L'occasion pour les agriculteurs oisiens de faire le point sur la situation de leur profession, marquée par une forte inquiétude.

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Pas de temps mort pour le président de la FNSEA, Arnaud Rousseau, qui, après une rencontre à huis-clos avec les membres du conseil d'administration de la fédération de l'Oise (voir page 5), fut l'invité vedette de sa journée de l'adhérent à laquelle deux cents personnes environ ont participé.
Après avoir salué les initiatives de solidarité envers les agriculteurs du Pas-de-Calais touchés par les inondations depuis plus d'une semaine - près de 2.500 hectares de culture sous l'eau -, Régis Desrumaux a invité les présidents d'arrondissements à rappeler les principaux sujets qui les ont mobilisés cette année et les inquiétudes qui persistent.

La première d'entre elles : l'intolérance grandissante vis-à-vis de l'activité agricole. Alice Avisse, présidente de l'arrondissement de Senlis, a dénoncé les multiples empêchements auxquels sont confrontés les agriculteurs : «Nous avons parfois le sentiment que nous gênons, jusque dans les conseils municipaux. Refus de permis de construire, arrêtés restreignant les passages d'engins agricoles, comme lors de la dernière moisson, sous le prétexte des grains tombés des remorques pouvant faire glisser un cycliste. Les détours occasionnés peuvent se compter à des dizaines de kilomètres !» «On ne sait plus comment bouger. Il devient impossible de faire passer des camions. On va devoir arrêter certaines productions», a renchéri un intervenant dans la salle. Pire, les nouveaux plans de circulation, les aménagements urbains et les réductions de taille des chaussées deviennent incompatibles avec une activité agricole impliquant le passage de matériel. «Nous sommes conscients que certains projets intensifient la densité de circulation de camions. Mais nous nous heurtons à un refus de dialoguer avec le monde agricole pour rechercher ensemble des solutions» a insisté Alice Avisse.

Il y a quelques semaines, les responsables syndicaux ont alerté les maires ruraux de l'Oise (UMO) sur cette problématique lors de l'assemblée générale de ces derniers, alors que l'agriculture représente parfois la seule activité de la commune. Arnaud Rousseau invite les exploitants à davantage s'engager dans les conseils municipaux afin de faciliter le dialogue et réduire les incompréhensions : «Dès lors qu'un maire prend des arrêtés contraignant pour l'activité agricole, il doit proposer des solutions alternatives.»

À ce titre, le président de la Fédération nationale a rappelé à toutes fins utiles, qu'un arrêté municipal doit faire l'objet d'un contrôle de légalité de la part des sous-préfets et peut être contesté par un recours auprès des tribunaux. Arnaud Rousseau dit avoir «bon espoir» que des discussions s'engagent «d'ici la fin de l'année» sur un projet de loi consacrant l'antériorité de l'activité agricole. Sans langue de bois, le président national appelle aussi ses collègues agriculteurs à «balayer devant leur porte».

Canal : faites ZADention !
Autre dossier chaud : le chantier du Canal Seine Nord Europe. Eric Labarre, de l'arrondissement de Compiègne, s'est de nouveau ému de «la gestion administrative très aléatoire des indemnisations», l'absence de garantie sur les aides Pac au-delà de 2027, l'incertitude sur la restitution à l'agriculture des parcelles temporairement occupées et sur les réserves foncières des collectivités.

Et la tension est montée d'un cran suite à l'intervention de Benoît Biberon, conseiller départemental en charge de l'agriculture. «Sans chercher d'excuses à la SCSNE», il a rappelé l'importance du projet du Canal Seine Nord Europe reliant la Seine à l'Escaut pour le département et le manque de personnels et de moyens dont dispose le maître d'ouvrage. «Quand on prépare un chantier d'une telle envergure depuis un certain temps sans être capable d'y mettre les moyens humains et financiers, c'est qu'on est incompétent ! a répliqué Régis Desrumaux. Par son inaction, la société du canal va générer une Zad puisque plus rien ne va avancer ! Elle en sera responsable».


Et le glyphosate ?
«Je suis sûr que le glyphosate va être réhomologué la semaine prochaine. L'enjeu est qu'il n'y ait pas de surtransposition en France des règles européennes, comme cela est fait pour de nombreuses molécules. Arrêtons d'importer des cerises étrangères traitées au dimétoate alors que nos producteurs en sont privés», affirme Arnaud Rousseau pour qui ce type de décisions ne devrait se prendre qu'à l'aune d'expertises sérieuses.

«Notre souveraineté alimentaire s'étiole, nous perdons des parts de marchés alors que la France rassemble tous les atouts pour réussir. Nous devons nous battre pour préserver nos moyens de production».
Concernant les jachères, le responsable syndical pense que les 4 % s'appliqueront en 2024 mais espère qu'à terme, le taux baissera entre 0 et 2 %, avec possibilité de cultures énergétiques, la FNSEA se bat pour cela. «L'agriculture ne doit pas devenir une citadelle assiégée. L'agriculture et l'alimentation françaises sont parmi les plus qualitatives au monde. Arrêtons la complainte permanente. C'est bon signe quand on parle fiscalité dans les réunions !»

Le petit élevage dans la prairie
Pascal Foucault s'est fait le porte-parole des éleveurs et des problématiques liées aux haies et aux prairies permanentes dont le fameux ratio annuel, celui qui plombe la profession. Comment valoriser les prairies en cas d'arrêt de l'élevage ? Il y a une vraie réflexion à mener, y compris sur les haies, exclues des IAE lorsqu'elles sont situées sur une prairie. «Il n'y a vraiment qu'un type dans un ministère pour penser qu'une haie dans une prairie a moins de valeur écologique qu'une haie dans une parcelle de blé», ironise Régis Desrumaux.
Et Arnaud Rousseau de conclure sur l'engagement de tous au sein de la FNSEA, «un syndicat à portée de baffes» mais aussi combatif devant les challenges à relever et les projets à porter.

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