L'Oise Agricole 21 avril 2022 a 09h00 | Par I.L.

HVE : les sujets de discorde attendront

Lancé en novembre 2021, le chantier de rénovation de la HVE avance sur des points techniques, mais n'a pas encore abordé les points plus politiques du dossier, dont l'éventuelle suppression de la voie B et plus généralement le rehaussement de l'ambition du référentiel.

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Les critères d'accès à la certification HVE, même par la voie A, pourraient évoluer.
Les critères d'accès à la certification HVE, même par la voie A, pourraient évoluer. - © Nadège Petit - FrAgTw

«Les groupes de travail ne s'attaquent pas à une rénovation en profondeur.» Pour Pauline Rattez, responsable Politiques agricoles et alimentaires au sein de la LPO, les discussions entamées depuis la fin 2021 autour de la révision du référentiel HVE se sont perdues au fil des réunions dans les détails techniques. Comme le lui ont indiqué les services du ministère, la révision de l'ambition environnementale du référentiel devra attendre la publication du rapport de l'OFB (Office français de la biodiversité), attendu pour la fin juin. En attendant, la consultation se poursuit.

Depuis novembre 2021, la rénovation de la HVE est animée par la Commission nationale de la certification environnementale (CNCE), au sein de laquelle siègent les organisations agricoles et les ONG. Le travail y a été réparti en quatre groupes de travail: biodiversité, irrigation, fertilisation, stratégie phytosanitaire. Avec une douzaine de ré-unions durant les derniers mois, les échanges se sont concentrés sur deux aspects : l'actualisation des référentiels de la certification, ainsi que la mise en conformité par rapport au nouveau cadre d'écoconditionnalité de la Pac.

Concernant le premier volet, «il y aura peut-être trois ou quatre mises à jour dans les prochains mois», prévoit Laurent Brault, responsable de l'association HVE Développement. Les documents diffusés par le ministère lors de la réunion du 17 mars détail-lent les points qui pourraient évoluer à court terme : listes des espèces et variétés menacées, liste des outils d'aide à la décision, liste des équipements permettant d'éviter les fuites dans les milieux, ou encore mode de calcul des surfaces concernées par les méthodes alternatives à la lutte chimique.

La voie B n'a pas dit son dernier mot

«Les critères dans la Pac et la HVE doivent être au minimum au même niveau», rappelle François Champahnet, ancien président de la CNCE qui a passé le flambeau fin mars à Patrick Falcone. Or, avec la nouvelle Pac, certains seuils des Bonnes conditions agricoles et environnementales (BCAE), ces critères indispensables pour espérer toucher les aides, ont été révisés à la hausse. Les experts de la CNCE planchent donc sur la manière de les prendre en compte notamment sur le pourcentage de la surface agricole dédiée aux infrastructures agroécologiques, le bilan azoté, la couverture des sols, ou encore la surface engagée dans une MAE visant à la réduction de produits phytosanitaires.

Pour Pauline Rattez (LPO), cette partie de la révision de la HVE ne justifierait pas de mobiliser autant de parties prenantes. «Nous l'avons dit au ministère : la DGPE aurait pu se charger de ce travail, qui épuise toutes les organisations siégeant à la CNCE.» Et en se concentrant sur ces points techniques, la discussion contournerait selon elle des sujets les plus épineux, comme la suppression de la voie B, fondée sur les charges de produits phytosanitaires par rapport au chiffre d'affaires. Interpellé en novembre au Parlement, Julien Denormandie avait reconnu «un vrai sujet» concernant cette voie d'accès à la HVE. Pour autant, «aucune décision concernant la voie B n'a été prise au sein de la CNCE», confie François Champahnet.

La révision pourrait attendre 2024

Selon la plupart des acteurs, la discussion de fond serait toute aussi ouverte sur la seconde voie de la HVE, la voie A. «Il y a un débat assez sain actuellement pour savoir si la HVE doit reprendre les mêmes critères que la Pac avec des coefficients plus ambitieux, ou si elle doit intégrer des critères supplémentaires, comme les zones humides», résume Laurent Brault chez HVE Développement.

La LPO, tout comme les autres ONG, plaide même pour concilier les deux approches : en plus de seuils rehaussés par rapport à la conditionnalité, la HVE pourrait intégrer des critères d'exclusion, comme l'utilisation de molécules classées CMR ou de néonicotinoïdes. «Le référentiel contient encore trop d'incohérence. Comment peut-on prétendre atteindre une haute valeur environnementale, tout en continuant d'utiliser des produits aussi néfastes pour la santé ou la biodiversité ?», s'interroge Pauline Rattez. Autant de propositions qui auront du mal à convaincre la FNSEA : «Plutôt qu'un grand virage, nous souhaitons poursuivre dans la continuité», glisse Hervé Lapie, rappelant la nécessité de ne pas décourager les «pionniers» de la HVE bénéficiant déjà de la certification.

Le calendrier, redoute la LPO, jouerait cependant contre les partisans de l'ambition. L'étude de l'OFB qui pourrait déclencher une révision en profondeur n'est pas attendue avant la fin juin, voire début juillet. Or, le ministère aura déjà transmis à cette date-là sa version finale du PSN (déclinaison française de la future Pac) à la Commission. Pis, les discussions qui s'engageront à la suite de l'étude OFB n'aboutiront certainement pas avant la mise en oeuvre du PSN début 2023, au risque de devoir attendre la révision annuelle du PSN de 2024.

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