L'Oise Agricole 19 août 2021 a 11h00 | Par Carine Vasseur et Dominique Lapeyre-Cavé

«Hors de question de subir la rigueur réglementaire ou, pire, de nouvelles contraintes !»

Alors que les conditions météorologiques retardent une fois de plus la moisson qui s'éternise, que les travaux s'accumulent, Régis Desrumaux, président de la FDSEA de l'Oise, fait le point sur les difficultés rencontrées par les agriculteurs.

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Régis Desrumaux, président de la FDSEA 60.
Régis Desrumaux, président de la FDSEA 60. - © Dorian Alinaghi

Le mois d'août est celui de l'implantation des couverts valant surfaces d'intérêt écologique (SIE) dans l'Oise. Quelles sont les obligations des agriculteurs ?

Régis Desrumaux : Les couverts SIE doivent être présents du 31 août au 25 octobre inclus dans l'Oise sur les parcelles que les agriculteurs ont indiquées dans leur déclaration Pac 2021. Si les parcelles changent ou que les espèces ne sont finalement pas celles annoncées, les exploitants doivent prévenir l'administration avant le 31 août via le formulaire de modification de la déclaration Pac téléchargeable sur TéléPac.

En tout état de cause, il reste 10 jours pour semer les couverts.

Pour rappel, si vos cultures dérobées comptant en SIE, vous servent également de Cipan car vous implantez derrière une culture de printemps, votre couvert doit dans ce cas être en place du 31 août au 1er novembre.

 

Avec cette moisson qui n'en finit pas, pensez-vous qu'il soit possible de semer les couverts SIE avant le 31 août ?

RD : Non, ce sera totalement impossible pour bon nombre d'exploitants. Beaucoup ont une moisson à finir, voir à sauver, de la paille à presser et à rentrer, du fumier à épandre, du lin à retourner, du colza à semer. Tout le monde est au taquet, avec une surcharge de travail, cette période est particulièrement éprouvante nerveusement et la priorité doit être donnée aux chantiers de récolte de céréales et de paille, puis aux semis de colza. En effet, l'avenir des exploitations en dépend et les semis de couverts SIE passent après, c'est malheureux mais impossible de faire autrement.

Bien entendu, les agriculteurs qui ne sont pas en retard doivent semer leurs couverts SIE aux dates réglementaires et, contrairement à l'année dernière où on était dans le sec, avec l'humidité de l'année, ces couverts devraient lever facilement.

 

Face à cette situation, que demande la FDSEA de l'Oise ?

RD : De la tolérance ! L'Etat et son administration doivent comprendre que les agriculteurs ne peuvent pas faire deux journées en une ! Même avec la meilleure volonté du monde, nul n'est tenu à l'impossible. Nous demandons à ce que des dérogations individuelles puissent être accordées aux agriculteurs qui en feraient la demande écrite.

Nous ne voulons pas de dérogation collective avec décalage des dates de présence obligatoire qui retarderait d'autant l'avance des paiements Pac et causerait également des difficultés à ceux qui envisagent de semer des cultures d'hiver après leurs couverts SIE.

Et puis nous demandons à ce que la campagne de contrôle SIE démarre plus tardivement pour prendre en compte les conditions de l'année. Les agriculteurs sont des chefs d'entreprise responsables : ils sèmeront les couverts SIE comme la réglementation le leur demande, mais ce ne sera sans doute pas dans les délais impartis. L'administration doit le comprendre.

Avec la FRSEA Hauts-de-France, nous avons initié des démarches en ce sens auprès de la Draaf et de la DDT de l'Oise, dont nous attendons le retour. En tout cas, les adhérents doivent absolument nous contacter s'ils sont contrôlés sur ce sujet.

 

Autre sujet qui est revenu sur le devant de l'actualité suite à la décision du Conseil d'Etat, les zones de non traitement (ZNT) riverains et l'annulation de toutes les chartes départementales. Quelle est votre réaction ?

RD : Ce sera un de nos sujets forts de la rentrée, dont nous discuterons lors de notre prochain conseil d'administration FDSEA en septembre. J'avoue que cette décision me déçoit fortement et suscite mon incompréhension. Je rappelle que nous avons travaillé pendant des mois à l'élaboration de cette charte départementale avec tous les partenaires autour de la table : Chambre d'agriculture, FDSEA, JA, administrations, collectivités, représentants des habitants et associations environnementales.

Nous avons cherché à élaborer une charte réaliste qui traduise notre volonté de vivre ensemble dans les campagnes. Nous avions obtenu des réductions à 3 et 5 m avec des engagements d'utilisation de buses anti-dérives, excepté pour certains produits dont la ZNT reste à 20 m (NDLR : voir l'Adhérent Infos n°47 du 25 juin 2021).

Et voilà que tout est réduit à néant ! Je ne comprends pas : pourquoi annuler ces accords départementaux ? quels sont les résultats des études d'impact que nous avions demandées sur les murs, les haies végétales ? Et, pire, on entend parler d'une limite incompressible de 20 mètres !

Je soumettrai à l'avis du bureau FDSEA ma position personnelle, à savoir qu'il est hors de question d'accepter le moindre mètre supplémentaire ! Ou alors qu'on nous indemnise à hauteur de 3.000 EUR/ha sur les surfaces que nous pourrions ainsi perdre !

 

En attendant la suite, que doivent faire les agriculteurs de l'Oise ?

RD : La charte départementale reste applicable dans l'attente du nouveau texte national. Les exploitants peuvent semer en bordure et ne traiter qu'à 3 ou 5 m selon les cas. Ils peuvent aussi choisir de mettre des bandes enherbées en voisinage des habitations. Mais, selon l'évolution à venir, il est impossible de continuer à payer des charges, des fermages, pour des surfaces que nous n'exploiterions plus. Si c'est la demande de la société, alors, il faudra qu'elle paie pour cela ! Dans la situation actuelle et la tension liée à cette moisson, nous ne sommes pas disposés à la moindre concession. Ce serait la goutte d'eau qui ferait déborder le vase.

 

Pour finir, quels autres dossiers seront à l'ordre du jour de la prochaine rentrée ?

RD : La moisson et la baisse de qualité à laquelle nous sommes confrontés au fur et à mesure des épisodes pluvieux. J'espère d'ailleurs que les organismes collecteurs feront preuve de la même mansuétude sur les PS que celle qu'ils ont adoptée pour les taux d'humidité. Les agriculteurs doivent retrouver des résultats économiques pour continuer. Et puis aussi les inondations, notamment dans le Noyonnais, corollaire de cette météo folle qui fait que cette moisson est la plus stressante que j'ai jamais connue depuis mon installation.

 

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