Finances des collectivités et statut de l'élu: des réformes attendues par les maires
Difficultés à maintenir un budget en équilibre, explosion des charges de fonctionnement, missions de plus en plus larges et complexes, agressions verbales ou physiques... les élus communaux sont à la peine et demandent de l'aide.
Une étude menée par le cabinet CBG Territoires sur l'évolution des finances des collectivités de l'Oise entre 2014 et 2022 est révélatrice des difficultés rencontrées par les communes. Les dépenses de fonctionnement ont explosé, notamment l'énergie, la suppression de la taxe professionnelle puis celle de la taxe d'habitation, malgré les compensations, et le contexte incertain rendent l'élaboration du budget communal complexe et la hausse des taux d'intérêt entame les capacités d'investissement.
Finances fragiles
Si le taux d'épargne (c'est-à-dire ce qui reste une fois que tout est payé) reste constant, autour de 18 à 20 % dans l'Oise, comparable à la France entière, pour les communes de moins de 3.500 habitants, le constat est à nuancer. En effet, de très petites communes avec peu de recettes ne peuvent pas épargner et sont en difficultés structurelles. Dans la strate supérieure, entre 3.500 et 20.000 habitants, l'épargne s'est améliorée entre 2014 et 2022, mais n'est que de 12 %. Néanmoins, pour 2023, on attend une situation dégradée. Et si le niveau d'investissement a aussi augmenté, c'est surtout le fait de l'inflation. La trésorerie n'est pas en baisse, mais les petites communes provisionnent plus que les grandes et leur fonds de roulement est meilleur. En 2023, on peut craindre une détérioration de la trésorerie.
Les communes de l'Oise s'endettent raisonnablement et sont moins endettées que la moyenne française. Néanmoins, certaines connaissent des situations délicates. D'autant plus que les mécanismes de compensation mis en place suite à la supression de la taxe professionnelle (FNGir) et de la taxe d'habitation (taxe foncière perçue par le Département redirigée vers les communes) font que certaines sont gagnantes et d'autres perdantes, pour une neutralité globale. Mais ils ne prennent pas en compte l'activité économique des communes et s'avèrent parfois injustes.
Alain Vasselle, le président de l'UMO, regrette ainsi la perte d'autonomie financière des communes qui dépendent des aides de l'État. Et de rappeler que les communes assurent le service public de proximité et qu'elles représentent 70 % des investissements publics. Elles restent l'interlocuteur privilégié des habitants et assurent la cohésion sociale des territoires.
D'où leur souhait de voir une réforme des finances locales. Avec des marges de manoeuvre réduites et des agents dont la catégorie moyenne est C et aurait besoin d'être augmentée pour attirer les candidats, les maires ont le sentiment que l'Etat gère son budget aux dépens de celui des communes. «Nous ne sommes pas entendus par le gouvernment et la réforme des finances locales, qu'on nous promet depuis des années, finit par être l'arlésienne», déplorent les maires.
Autre demande, la réforme du statut de l'élu. Éric Landot, avocat en droit public, rappelle qu'un guide à ce sujet est disponible en téléchargement sur le site de l'AMF (Association des maires de France). Une proposition de loi est en cours avec plusieurs points dont la déclaration de patrimoine des élus pour les communes de plus de 20.000 habitants, la nécessité d'un entretien avec l'employeur en début de mandat lorsque le maire est salarié, les crédits d'heures, l'autorisation d'absences, le droit à la formation et des indemnités de fonction qui soient plus incitatives. L'idéal serait que l'élu local puisse bénéficier d'un statut équivalent à celui des sapeurs pompiers.
Dialogue
Enfin, l'assemblée de l'Union des maires de l'Oise a été l'occasion pour les élus d'interpeler la préfète, Catherine Seguin, et ses services. D'abord, sur la défense extérieure contre les incendies, responsabilité communale. Les maires doivent garantir l'alimentation en eau sur leur commune. La préfète annonce qu'un assouplissement de la loi est prévu et que les sites d'activité privés doivent prévoir eux-mêmes leur alimentation en eau. Le directeur adjoint du Sdis, le colonel Christophe Betinelli, est plus circonspect sur cet aspect et rappelle que les risques courants sont bien du ressort de la commune.
Autre sujet d'inquiétude, les zones blanches du département, avec des opérateurs de téléphonie mobile qui ont du mal à les reconnaître. Le New Deal mobile, signé jusqu'en 2024, va permettre la pose de 3 antennes de plusdans l'Oise, mais les sites n'ont pas encore été choisis. Insuffisant.
Enfin, la dématérialisation des autorisations d'urbanisme pour les communes de plus de 3.500 habitants a laissé des maires insatisfaits. Alors que cela devait simplifier les procédures pour les mairies, les usagers et l'État, le mauvais fonctionnement de la plateforme n'a pas été satisfaisante.
Mais Catherine Seguin appelle les édiles à plus de patience, le système a été amélioré depuis sa mise en route. «C'est bien là le problème : on nous impose des obligations sans savoir si elles sont applicables et si les outils sont efficaces.»
Régis Desrumaux a exhortés les maires à ne pas prendre d'arrêtés de restrictions de circulation qui visent les poids lourds d'abord mais qui, du fait des tonnages, s'appliquent aux engins agricoles.
Des sujets de division entre État et collectivités existent, comme le Zan (zéro artificialisation nette) qui prive les communes de développement économique. Les maires veulent changer leurs relations avec l'État central, pour plus d'échanges.
Le dialogue, Catherine Seguin, de son côté, le veut fluide, direct et constructif, rappelant que l'État se voit en facilitateur et accompagnateur des collectivités dans les grands enjeux que sont la transition écologique, la souveraineté nationale, le plein emploi et la défense des valeurs de la République. Elle rappelle qu'il faudra multiplier les énergies renouvelables par cinq d'ici 2031, les communes doivent s'impliquer.
Il semble que la cohésion des territoires ait autant besoin d'actes que de paroles.
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