L'Oise Agricole 08 décembre 2022 a 08h00 | Par M.R.

Électricité : ce que le gouvernement réserve au secteur pour l'hiver

Matignon a précisé les contours de l'amortisseur «électricité» et présenté la mise en oeuvre des délestages électriques qui pourraient être opérés cet hiver. Les agriculteurs seront concernés, quelques sites agroalimentaires épargnés.

Abonnez-vous Reagir Imprimer
Matignon rappelle que les risques de coupures seront signalés trois jours à l'avance, et confirmés la veille à partir de 17h sur le site Ecowatt. Les délestages interviendront de 8h à 13h et de 18h à 20h, pour une durée maximale de deux heures.
Matignon rappelle que les risques de coupures seront signalés trois jours à l'avance, et confirmés la veille à partir de 17h sur le site Ecowatt. Les délestages interviendront de 8h à 13h et de 18h à 20h, pour une durée maximale de deux heures. - © Pixabay

Il y a quelques jours, la Première ministre devait envoyer une circulaire aux préfets leur précisant les conditions de mise en oeuvre des délestages électriques qui pourraient être mis en oeuvre à l'échelle infradépartementale cet hiver, notamment au mois de janvier, en raison de la baisse de production du parc nucléaire, a annoncé le gouvernement dans un point avec la presse le 30 novembre. Dans l'agroalimentaire, «quelques sites industriels sont placés dans la liste des clients prioritaires», laquelle restera confidentielle, a indiqué Matignon. Les sites placés sur cette liste ne subiront pas de délestage, ils en seront prévenus par les préfets.

Du côté du secteur agricole, le gouvernement indique que les agriculteurs seront considérés comme des clients comme les autres. Matignon précise que certaines installations classées sont dotées de groupes électrogènes. Dans les prochaines semaines, les préfets «réuniront les acteurs», pour organiser l'éventualité d'un délestage, afin d'«adapter les horaires et les gestes métiers». Matignon rappelle que les risques de coupures seront signalés trois jours à l'avance, et confirmés la veille à partir de 17h sur le site Ecowatt. Les délestages interviendront de 8h à 13h et de 18h à 20h, pour une durée maximale de deux heures.

L'«amortisseur électricité» réservé aux PME

La veille, le gouvernement avait détaillé le dispositif «amortisseur électricité». Côté entreprises, il sera finalement réservé aux PME (moins de 250 salariés, 50 MEUR de chiffre d'affaires et 43 MEUR de bilan) «non éligibles au bouclier tarifaire». Il n'est pas ouvert à tous les contrats professionnels comme annoncé initialement. L'aide sera mise en place au 1er janvier 2023 pour une durée d'un an. Pour en bénéficier, les entreprises devront confirmer à leur fournisseur d'électricité qu'elles relèvent du statut de PME.

«Pour un consommateur ayant une part énergie de 350 EUR/MWh (0,35 kWh), l'amortisseur électricité permettra de prendre en charge environ 20 % de la facture totale d'électricité, explique le communiqué. L'aide sera intégrée directement dans la facture d'électricité des consommateurs et l'État compensera les fournisseurs.» L'amortisseur électricité s'ajoute aux autres mesures gouvernementales : la baisse de la fiscalité sur l'électricité, le bouclier tarifaire pour les TPE de moins de dix salariés et de 2 MEUR de chiffre d'affaires, et les aides au paiement des factures d'énergie. Ces dernières sont ouvertes à toutes les entreprises jusqu'au 1er janvier 2023. À partir de cette date, les TPE et PME éligibles à l'amortisseur électricité ne pourront plus en bénéficier.

- © Twitter

Franck Sander, président de la CGB

«Les dispositifs annoncés par le gouvernement doivent être adaptés aux spécificités agricoles»

Quel est l'impact de l'énergie sur les exploitations agricoles et quelles sont les exploitations les plus concernées par les hausses des prix ?

Toutes les exploitations sont concernées, mais certaines sont davantage fragilisées. Dans les productions végétales, je pense aux endiviers, aux producteurs de pomme de terre et à tous les agriculteurs qui ont recours à l'irrigation pour sécuriser leurs récoltes (producteurs de maïs, de semences, de fruits et légumes sous contrat). Pour les productions animales, les producteurs de lait pour la traite, les éleveurs de volailles et de porcs qui ont besoin d'électricité pour la ventilation et le chauffage des bâtiments sont particulièrement concernés. Toutes productions confondues, les carburants, le gaz et l'électricité ont augmenté de 76 %, 25 % et 7 % en 2022 par rapport à 2021. Sans parler des engrais qui ont fait un bond de 94 %.

Des dispositifs ont été annoncés par le gouvernement tels que le bouclier tarifaire et l'amortisseur d'électricité. Sont-ils adaptés à la production agricole ?

C'est un premier pas. Toutes les entreprises continueront à bénéficier de la baisse de la fiscalité sur l'électricité (TICFE) à son minimum légal européen et du mécanisme d'accès régulé à l'électricité nucléaire historique (ARENH). Pour les agriculteurs concernés, le bouclier tarifaire permettra de plafonner les hausses des factures d'électricité à 15 % l'an prochain et pour les autres, ils seront éligibles à l'amortisseur d'électricité. Les exploitations agricoles, qu'elles aient déjà signé un contrat ou qu'elles soient en cours de renouvellement bénéficieront de ce mécanisme dès lors que le prix du mégawattheure de référence est supérieur à 180 EUR/MWh. Cet amortisseur se matérialisera par une aide forfaitaire sur 50 % de la consommation permettant de compenser l'écart entre le prix plancher de 180 EUR/MWh et le prix du contrat plafonné de 500 EUR/MWh. Au-delà de ces dispositions qui concernent toutes les petites entreprises, nous travaillons à ce que les spécificités agricoles soient davantage reconnues avec les fournisseurs d'électricité pour alléger les factures. Nous plaidons notamment pour que le bouclier tarifaire soit étendu au-delà de 36 kVA, pour toutes les très petites entreprises (TPE), ce plafond n'étant pas une contrainte communautaire.

Le gouvernement a annoncé d'éventuels délestages d'électricité au mois de janvier prochain. Comment vous y préparez-vous ?

Les agriculteurs n'échapperont pas aux délestages comme l'ensemble de la population française. Je crains d'ailleurs qu'ils soient davantage touchés, car les zones rurales seront davantage ciblées que les agglomérations. En effet, les secteurs prioritaires identifiés par le gouvernement comme les hôpitaux et les zones proches qui échapperont aux coupures se trouvent dans les zones urbaines. Ces délestages auront un gros impact sur les élevages et les transformations agricoles et alimentaires (laiteries, abattoirs...). Actuellement, nous travaillons avec les préfets pour identifier les activités les plus concernées et voir de quelle façon nous pouvons anticiper et limiter l'effet de ces délestages.

La loi sur les énergies renouvelables est en discussion en ce moment à l'Assemblée nationale. Le projet de loi du gouvernement répond-t-il à vos attentes ?

Pour ce sujet, nous avons à la FNSEA une position très claire : pas d'installations photovoltaïques au sol sur les terres agricoles, hors friches et terres incultes. Ces installations doivent être réservées aux toitures, aux friches, aux bas-côtés des infrastructures ferroviaires et des autoroutes... Nous sommes favorables à l'agrivoltaïsme, à condition que les terres qui portent ces panneaux soient réellement cultivées et que les champs concernés soient éligibles à la Pac, ce qui garantira une production agricole. Nous avons une ligne rouge : la terre agricole doit conserver sa vocation alimentaire. En ce qui concerne le biogaz, il nous appartient de simplifier les procédures qui sont excessivement longues quand un agriculteur ou un groupe d'agriculteurs projette de monter une installation. Et pour préserver la vocation alimentaire de l'agriculture, rappelons que 15 % maximum de la culture principale peut être dédiée à la production d'énergie dans un méthaniseur.

Réagissez à cet article

Attention, vous devez être connecté en tant que
membre du site pour saisir un commentaire.

Connectez-vous Créez un compte ou

Les opinions emises par les internautes n'engagent que leurs auteurs. L'Oise Agricole se reserve le droit de suspendre ou d'interrompre la diffusion de tout commentaire dont le contenu serait susceptible de porter atteinte aux tiers ou d'enfreindre les lois et reglements en vigueur, et decline toute responsabilite quant aux opinions emises,