Écophyto : engagez-vous, qu’ils disaient !
«Qui s’engage vraiment dans la réduction des produits phytosanitaires ?» C’était le thème d’une table ronde organisée pendant le colloque Dephy Expé, qui a fait salle comble. Preuve de l’intérêt des producteurs pour le sujet. Compte-rendu des débats.
La réduction des produits phytosanitaires, tout le monde en parle. Mais qui assume vraiment le risque qui va avec ? La question était au centre d’un débat organisé fin novembre à Artois Expo en parallèle du projet Dephy Expé, mené dans la région dans le cadre du plan Écophyto.
«Quand j’ai appris le thème de cette table ronde, commence Anne Coupet, présidente du Pôle légumes Nord, d’emblée, j’ai bondi sur ma chaise. En tant que productrice, j’ai l’impression que c’est moi qui prends tous les risques de la réduction des phytos : techniques, économiques, financiers…» «Autant de risques que vous seriez prête à partager ?», lui lance l’animateur avec un brin d’ironie avant de s’entendre répondre un «oui !» qui résonne comme un cri du cœur.
Partage du risque à tous les étages ?
«Le partage du risque devrait se faire à toutes les étapes, suggère Anne Coupet, sollicitée par l’animateur. Ce genre de démarche va m’amener des pertes, je veux être sécurisée sur ma rémunération.» «Le risque est double pour le producteur et pour l’industriel», répond Bertrand Ouillon du GIPT. «Ne pas avoir les tonnages pour approvisionner nos usines, c’est aussi un risque pour nous», opine Aurélie Lizé, responsable du pôle recherche et innovation agro chez Bonduelle, avant de reconnaître : «Le consommateur a bien intégré le surcoût lié au bio. Mais toutes les autres externalités liées à la réduction des phytosanitaires, on ne sait pas encore les valoriser.»
«Le bio a une démarche claire, ajoute Robert Bréhon, de l’UFC Que Choisir de Lille. Quand on achète du bio, en principe on sait ce qu’on achète. Aujourd’hui, il y a environ quatre ou cinq labels avec engagement d’État. Si le monde agricole veut s’exprimer auprès du consommateur sur la réduction des phytosanitaires, il faut un message simple et clair.»
Manque de repères en rayon
Contrairement au bio, peu de repères existent en effet en rayon pour signaler au consommateur la diminution des phytos par les producteurs en conventionnel. «Les labels existants portent surtout sur les territoires, pas sur les systèmes de production, résume le président de la Chambre d’agriculture Nord-Pas de Calais, Christian Durlin. Il y a tellement d’étapes entre le producteur et le consommateur que tout est un peu mélangé… Le consommateur est multiple : il peut manger un casse-croûte le midi, un plat préparé le soir et avoir des repas un peu plus élaborés le weekend.
Est-il prêt à mettre la main à la poche pour les producteurs qui font des efforts ?» «C’est difficile de parler pour le consommateur, tempère Robert Bréhon. Il reçoit des messages souvent contradictoires. Il a besoin de pouvoir se reposer sur des références. Il veut de la transparence, voir ce qui se passe. Il est inquiet, mais interrogatif.» Serait-il également manipulé par les différents messages qu’il reçoit ? «On l’a formaté à avoir des carottes bien droites… Aujourd’hui, il faut faire la démarche inverse et lui dire qu’une consommation saine ne passe pas forcément par ça.»
Valoriser par des filières qualité ?
Depuis 2013, la marque Filière qualité Carrefour entend valoriser les démarches agroécologiques entreprises par les producteurs. «Le but est d’y aller par étapes, en commençant par les plus faciles à supprimer, explique Justine Gomez, chargée de projets qualité et développement durable de l’enseigne, en mentionnant la démarche sur le packaging. Nous travaillons autour de quatre axes : le sol, la biodiversité, les intrants et la gestion de l’eau.» «C’est du HVE qui ne dit pas son nom», commentera Christian Durlin.
Les cultures régionales à l’épreuve d’écophyto
Réduire d’au moins 50 % l’utilisation de produits phytopharmaceutiques dans les systèmes de culture régionaux : c’est l’objectif du projet national Expé Dephy. Expérimenté à l’échelle du Nord-Pas de Calais à Lorgies (59) et Tilloy-lès-Mofflaines (62) par la Chambre d’agriculture, le Pôle légumes région Nord, le lycée agricole de Tilloy, l’Institut technique de la betterave, la Fredon ou encore l’Isa, il visait à réduire la fréquence de traitement de moitié sur des cultures représentatives de la région : pommes de terre, betterave, légumes, céréales. Mené sur six ans, de 2012 à 2018, le projet a joué sur différents leviers : biocontrôle, désherbage mécanique, outils d’aide à la décision (OAD)...
«Les premiers résultats sont encourageants», explique Ali Siah, enseignant à l’Isa et chef de projet Expé Dephy. Si le choix de variétés résistantes et de produits de biocontrôle est techniquement fiable, le coût de certaines pratiques reste encore «trop élevé», notamment pour les variétés d’oignons, de défanant de pomme de terre, ou en désherbage mécanique... «Certains leviers sont transférables dès aujourd’hui : OAD Miléos, désherbage mécanique, choix variétal. D’autres nécessitent un raisonnement plus approfondi : rotation, Cipan, faux semis, travail du sol...»
Berel (55) | 23 février 2021 à 19:31:10
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