CSNE, plan de relance, la Chambre d'agriculture de l'Oise fait le point
Le mardi 17 novembre, le Crédit Agricole a accueilli la session de la Chambre d'agriculture de l'Oise afin de dresser le bilan de cette année, mais aussi de parler des nouveaux enjeux agricoles.
Hervé Ancellin, président de la Chambre d'agriculture de l'Oise, a débuté cette session en annonçant deux évènements désastreux, le décès de Bernard Langlet (président de la FDSEA 60 de 1975 à 1984 et élu à la Chambre d'agriculture pendant 36 ans) et la mort accidentelle d'un agriculteur à Villers-Saint-Frambourg, enseveli sous plusieurs centaines de tonnes de blé après l'effondrement d'un mur dans un bâtiment de stockage.
Après un éclaircissement sur la présentation de l'organigramme structurel de la Chambre de région (disponible sur le site internet de L'Oise Agricole), Corinne Orzechowski, la préfète de l'Oise, a martelé que la collaboration est primordiale pour toutes réussites. «J'ai connu la régionalisation des Chambres de métiers qui ont perdu peu à peu le contact avec les départements. Il ne faut pas oublier que les problématiques se trouvent dans les départements, nous avons une collaboration extrêmement proche sur des sujets qui sont territoriaux. Il faut maintenir ce lien proche entre les élus des territoires avec l'administration locale, c'est là où l'on est plus réactif et efficace.»
Autre sujet qui refait surface, le canal Seine Nord Europe (CSNE). Bernadette Bréhon et Judith Liard, juriste à la Chambre d'agriculture de l'Oise, ont présenté l'intérêt économique du CSNE. Le canal reliera l'Oise au canal de Dunkerque-Escaut, sur 107 km de Compiègne à Aubencheul-au-Bac, près de Cambrai. Ce canal à grand cabarit est un projet national et régional unique, fortement soutenu par l'Union européenne, l'État et les territoires. Porteur de développements, d'innovations et d'attractivité pour les territoires, le CSNE est un véritable projet d'aménagement du territoire qui va s'inscrire durablement dans le paysage économique, social et environnemental français. «De nombreux agriculteurs sont liés à ce projet. Nous devons obtenir des garanties pour les exploitants agricoles et les propriétaires (négociations, protocoles, conventions), limiter à tout prix l'impact sur le foncier agricole. Il faut optimiser les emprises liées au projet lui-même, aux dépôts et aux compensations environnementales. Nous dévons également limiter les compensations environnementales en épargnant le plus possible des surfaces agricoles. Il faut profiter des retombées économiques en phase travaux et en phase fonctionnement du canal. De plus, nous devons maintenir le potentiel du territoire impacté» explique Bernadette Bréhon.
Elle et Judith Liard sont revenues sur le sujet du foncier agricole. «En collaboration avec l'ensemble des départements, on a obtenu des compensations foncières, c'est-à-dire une constitution de 2.200 hectares de réserves foncières via la Safer. On a également travaillé sur la restructuration du parcellaire qui se fait à travers l'aménagement foncier agricole et forestier et environnemental qui concerne 80.000 hectares. Qui plus est, on a limité l'impact des zones de dépôt sur le foncier agricole en priorisant les terrains publics, en retournant en priorité les terres à l'agriculture des zones de dépôt agréés après un réaménagement concerté. Ce travail est encore en cours.
L'autre l'impact qu'on voulait limiter concerne les compensations environnementales sur le foncier agricole. Le canal traverse des zones humides qu'il y a lieu de reconstituer à hauteur de une fois et demie. L'objectif est d'épargner le plus possible le foncier agricole. Cependant, il reste des questions à régler, notamment la mise en oeuvre du fonds de maintien du potentiel agricole, l'application de la compensation collective agricole au projet du canal et l'indemnisation des aides Pac qui vont être perdues...»
Les autres sujets de préoccupation sont les zones de dépôt retenues, les compensations environnementales notamment pour le secteur 2, les emprises nécessaires à la réalisation des plateformes multimodales et les voies ferrées qui sont gérés par les collectivités (Noyon 40 ha, Nesle 80 ha, Péronne 60 ha et Marquion 156 ha), la question du réemploi des emprises du canal du Nord qui appartiennent à VNF.
Un fonds dédié
Mais en quoi le CSNE pourrait-il participer à un projet agricole structurant ? Ludivine Campbell, juriste à la FRSEA, explique que «le protocole d'accord de 2008 prévoit l'institution d'un fonds de maintien du potentiel agricole de 2,5 millions d'euros pour tous les départements traversés par le canal. Les Chambres d'agriculture du Nord-Pas-de-Calais, de l'Oise et de la Somme se sont mises d'accord pour que ce fonds puisse financer un ou des projets agricoles structurants».
Toutefois, ce fonds date de 2008 donc la somme correspondait aux enjeux de cette année-là. Depuis, la valeur des terres, le blocage du territoire pendant un certain nombre d'années et la mise en place de la compensation agricole ont poussé les Chambres d'agriculture à réactualiser «parce qu'il paraissait insuffisant en vue des autres projets, sous la compensation agricole, qui auront des sommes dix fois plus importantes à verser à l'agriculture» ajoute-t-elle. Depuis novembre 2019, de nombreuses démarches ont recensé les propositions du terrain. Le 10 juin 2020, un recensement des projets qui s'inscrivent dans une démarche collective, recensés dans les départements, a été présenté aux élus régionaux sous le nom de «liste à la Prévert». Le 16 septembre, des enjeux communs ont été identifiés dans les départements des Hauts-de-France. Il y en a trois plus précisément. Le premier est de soutenir le développement des productions agricoles et de faciliter l'émergence de nouvelles productions. Le deuxième enjeu est de consolider les filières existantes et d'encourager de nouvelles. Et le dernier est d'améliorer la capacité d'accueil et d'hébergement. «Concernant l'Oise, les objectifs et les actions recensés sont de conforter les productions à forte valeur ajoutée en constituant des réserves d'eau collectives en vue d'irriguer les cultures. De plus, il y a la nécessité de faciliter la distribution de produits locaux en circuits courts, la création de magasins fermiers, de maintenir les unités de déshydratation et de créer un moulin en libre-service, un abattoir et un atelier de découpe», affirme Ludivine Campbell.
«La Société du canal a été saisie de notre demande et attend qu'on lui fasse des propositions précises ainsi que la nécessité de réactualiser le fonds ; une convention cadre est en cours de signature. Des contacts ont été pris auprès de la Draaf pour examiner la mise en oeuvre de ce fonds de maintien dont l'utilisation est encadrée par le droit européen de la concurrence et rentre dans le régime des aides notifiées car il s'agit d'une aide publique. Nous avons déjà posé des jalons auprès de Xavier Bertrand, président du conseil de surveillance de la Société du CSNE et président du Conseil régional, sur la nécessité de lancer une étude pour la réalisation de réserves d'eau. Il nous reste également à préciser le cahier des charges de cette étude. Nadège Lefebvre, vice-présidente du conseil de surveillance de la société du CSNE et présidente du Conseil départemental de l'Oise, a été saisie. Nous devons axer notre demande sur le premier enjeu avec la constitution des réserves ou de retenues d'eau, nous avons là un bon prétexte de faire avancer le débat sur une question essentielle concernant l'agriculture de demain. Nous pouvons parallèlement faire cette proposition concernant le plan de relance. Les besoins en eau ne sont plus à démontrer compte tenu des évolutions climatiques et de la nécessité d'assurer pour nos cultures légumières et maraîchères l'approvisionnement en eau qui va être de plus en plus restreint dans l'avenir», précise-t-elle.
Un plan de relance de 1,2 Mds d'euros
Le plan de relance annoncé par le gouvernement comporte un important volet consacré à la transition agricole, alimentaire et forestière, puisque 1,2 milliards d'euros sont dédiés à cet accompagnement auxquels s'ajoutent les mesures transversales du plan de relance dont bénéficieront également les acteurs des secteurs agricole, alimentaire et forestier. Dans ce budget, le budget sera divisé en trois priorités : reconquérir la souveraineté alimentaire (356 MEUR), accélerer la transition écologique au service d'une alimentation saine, durable et locale pour tous les français (346 MEUR), accompagner l'agriculture et la forêt dans l'adaptation au changement climatique (300 MEUR) ; les 200 MEUR restant seront redistribués en fonction des besoins et de l'alimentation.
Ce projet s'axe en cinq thématiques. La première est d'accélérer la transition agro-écologique. Elle contient plusieurs mesures comme la création d'un plan haies pour aider les agriculteurs qui souhaitent favoriser la biodiversité autour de leurs cultures ; une subvention sous forme d'un bon pour la réalisation d'un bilan carbone à destination des agriculteurs récemment installés, par une chambre d'agriculture, un organisme national à vocation agricole et rurale ou tout autre organisme reconnu par le MAA. Cela permettra la réalisation d'un diagnostic, suivi d'un bilan et de propositions d'améliorations ; un plan «structuration de filières» piloté par FranceAgriMer dont les dépenses éligibles sont des investissements matériels (y compris prototypes industriels) et immatériels (y compris salaire du coordinateur, prestations d'études, de conseil...) ; un abondement du fonds avenir bio qui fonctionnera par appels à projets gérés par l'Agence Bio ; des actions de formation et assistance technique pour les organisations de producteurs pour qu'elles puissent par exemple accéder à une formation sur les outils de la loi Egalim ou pour se doter d'un appui juridique dans le cadre de négociations commerciales ; et la création d'un crédit d'impôt HVE exceptionnel pour 2 ans à destination des exploitations certifiées Haute valeur environnementale pour promouvoir et accompagner la performance environnementale.
La thématique suivante vise à une stratégie nationale pour les protéines végétales avec la mise en place du plan «protéines végétales» via différents dispositifs de financement (investissements matériels dans les exploitations agricoles, structuration des filières, obtentions variétales, développement et transfert, promotion de la consommation de légumineuses).
La troisième thématique concerne les filières animales modernisation, sécurité sanitaire et bien-être animal. Cela concerne la modernisation des abattoirs dont des projets d'abattoirs de proximité (investissements dans les outils d'abattage et de découpe, vidéosurveillance etc) ; et de mettre en place un pacte biosécurité et bien-être en élevage qui visera à permettre aux éleveurs d'investir pour renforcer la prévention des maladies animales tout en améliorant les conditions d'élevage.
La quatrième thématique est le renouvellement des agroéquipements nécessaires à la transition agro-écologique et à l'adaptation au changement climatique. Il s'agit de mettre en place une prime à la conversion pour inciter les exploitations agricoles à acquérir des matériels de précision ou de matériels de substitution permettant d'intégrer des pratiques alternatives à l'usage d'intrants. Elle permettra également de soutenir l'investissement au moment de l'installation de nouveaux agriculteurs inscrits dans la transition agro-écologique. De plus, un financement de matériels et autres équipements de protection permettra de faire face aux principaux aléas climatiques (gel, grêle et épisodes de sécheresse) pour augmenter la résilience des exploitations face aux aléas climatiques, en les aidant à se doter d'un matériel adapté. Avec l'accompagnement des entreprises d'agro-équipements et de biocontrôle en se fondant sur les outils déjà mis en oeuvre par BPI France, l'objectif est d'accélérer le développement des entreprises qui s'occupent des équipements de précision et de biocontrôle.
La dernière thématique concerne l'aide à la forêt pour s'adapter au changement climatique pour mieux l'atténuer. Dans cette dernière, les mesures prévues sont les investissements forestiers pour l'amélioration, le renouvellement et l'adaptation des forêts au changement climatique ; des investissements dans la filière bois pour soutenir la modernisation de la première et seconde transformation du bois et dans le développement des constructions en bois ; et l'acquisition d'une couverture LiDAR HD (Light detection and ranging) pour les territoires à enjeux. Les crédits du plan de relance viendront en complément des crédits du FTAP, de l'IGN et de la DGPR visant à une couverture intégrale du territoire métropolitain à horizon de 5 ans.
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