L'Oise Agricole 17 octobre 2019 a 08h00 | Par Dominique Lapeyre-Cavé, Vincent Fermon

Christiane Lambert apporte son soutien aux victimes de Lubrizol

Parce que les ministres concernés par l’incendie Lubrizol ont effectué de nombreux déplacements en Seine maritime, certes le département le plus touché, Christiane Lambert, présidente de la FNSEA, a choisi elle de rencontrer des agriculteurs de l’Oise et de la Somme ce lundi 14 octobre, avant la levée partielle de l’arrêté de restriction sur le lait.

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Christiane Lambert en visite dans l’Oise sur l’exploitation de Clothilde Ghesquière, jeune installée en maraîchage bio. La plupart de ses productions sont pour l’instant invendables.
Christiane Lambert en visite dans l’Oise sur l’exploitation de Clothilde Ghesquière, jeune installée en maraîchage bio. La plupart de ses productions sont pour l’instant invendables. - © Dominique Lapeyre-Cavé

Responsables syndicaux de la région, élus du Conseil départemental et du Conseil régional, responsables d’organisations professionnelles agricoles, administrations et presse largement conviée s’étaient donné rendez-vous sur le terrain.

Clothilde Ghesquière, jeune agricultrice installée en maraîchage et arboriculture bio depuis mars, a accueilli les visiteurs du jour sur son exploitation située au Hamel (Oise). Devant Louis Le Franc, préfet de l’Oise, et Christiane Lambert, elle a témoigné de ses difficultés : impossibilité de vendre ses légumes produits à l’air libre, possibilité de vendre ceux sous serre, récoltes effectuées pour éviter des dégradations mais consignées dans l’attente des résultats d’analyse et de l’éventuelle levée de l’arrêté préfectoral, mise en activité partielle de ses salariés saisonniers… Et surtout, ses ventes en forte baisse et l’annulation de sa participation à des marchés (quatre par semaine) en région parisienne où elle commercialise une partie de sa production. Heureusement, elle a pu assurer la livraison de ses paniers pour les Amap avec des légumes sous serre ou à partir de ses stocks en frigo. N’empêche : le manque-à-gagner est là et la perte de confiance du consommateur palpable, même si certains clients assurent la jeune agricultrice de leur solidarité.

Face à ce constat, Christiane Lambert ne mâchait pas ses mots devant la communication du ministre de l’Agriculture qui laissait entendre vendredi que la collecte de lait allait pouvoir reprendre, alors que rien n’était possible tant que l’Anses n’aurait pas donné son feu vert. «On veut des informations fiables, pas de faux espoirs qui minent les producteurs. Je sais bien qu’il est difficile de comprendre ce que c’est de travailler tous les jours pour, au final, jeter ou ne pas vendre sa production. Mais, dans cette crise, les agriculteurs ont été particulièrement responsables, conscients qu’on ne joue pas avec la santé des consommateurs» rappelait la présidente de la FNSEA. «Nous, on fait confiance à l’Anses. Quand on nous dira qu’on peut revendre, on le fera». Elle affirmait par ailleurs que le seul responsable est Lubrizol et que toutes les mesures d’accompagnement qui se mettent en place ne servent qu’à faciliter la gestion des trésoreries mais que l’Etat ou les collectivités ne doivent pas se substituer à Lubrizol.

Louis Le Franc faisait l’historique et le travail mené en partenariat avec la profession agricole depuis le début de la crise : cellule d’urgence, réunion en soirée à Sarcus, application souple de l’arrêté. Il pointait la perte de confiance des consommateurs malgré des agriculteurs totalement responsables qui ont accepté des mesures de précaution draconiennes. Mais il mettait en avant la mobilisation des organisations professionnelles agricoles, FDSEA, JA, Crédit agricole, MSA, Groupama pour trouver rapidement des moyens de mettre en place des soutiens à la trésorerie et la nécessité d’obtenir des indemnisations.

La seule solution, pour les éleveurs laitiers, a été de jeter le lait produit et d’arrêter les ventes d’œufs, de miel, de fruits et de légumes. Le préfet insistait sur le fait que le travail d’accompagnement devra se poursuivre au-delà de la levée des restrictions car il s’agira de restaurer la confiance du consommateur.

Selon Christiane Lambert, la filière laitière, en place depuis de nombreuses années, est organisée et a les moyens d’assurer un relai financier. Il en est tout autrement de la filière œufs, qui n’existe que depuis quelques mois, ou du maraîchage. Et puis que faire des cultures en terre ? des maïs non encore ensilés ?

 

Un formulaire unique

Louis le Franc plaidait pour un guichet unique qui traite toutes les demandes d’indemnisation et pour que les déclarations de perte soient faites sur l’honneur. Luc Smessaert, vice-président de la FNSEA et trésorier du FMSE (fonds national de mutualisation sanitaire et environnemental), indiquait que ces services sont en train de travailler sur un formulaire unique, bordé juridiquement, et sur la rédaction d’une convention avec le fonds Lubrizol.

«En aucun cas, les indemnisations ne devront être considérées comme des soldes de tout compte, affirmait-il. La responsabilité de l’industriel est engagée et l’Etat devra accompagner par écrit le dispositif auquel nous travaillons. Les formulaires du FMSE seront envoyés à tous les exploitants puis traités à leur retour. Les premiers paiements pourraient avoir lieu en décembre.»

La question était ensuite posée, et notamment par Sébastien Windsor, président de la Chambre d’agriculture de Seine maritime, venu en voisin solidaire, des exploitants hors zones mais quand même impactés par une baisse de leurs ventes. «Les pertes seront à quantifier au-delà de la zone de restriction et surtout dans le temps.»

Étaient cités des producteurs de maroilles qui ne peuvent plus utiliser des pulpes de betteraves issues de la zone ou un silo de céréales dans la zone mais ventilé donc interdit de vente pour l’instant.

En tout cas, chacun se félicitait et Régis Desrumaux, secrétaire général de la FDSEA de l’Oise, s’en faisait l’écho, de la bonne entente entre les services de l’État et la profession agricole afin de gérer au mieux et de façon pragmatique cette crise.

La visite de Christiane Lambert s’est poursuivie dans le Somme, chez Christophe d’Halescourt, éleveur laitier à Brettencourt, qui venait d’apprendre que l’Anses avait confirmé que les analyses réalisées sur des échantillons de lait prélevées dans plusieurs exploitations des départements traversés par le nuage Lubrizol étaient sans danger. C’est la préfète de la Somme, Muriel Nguyen qui lui a appris la bonne nouvelle, au cours de la discussion avec Christiane Lambert, les élus et responsables agricoles présents.

Unanimement, responsables professionnels et politiques considèrent que l’indemnisation des pertes liées à cet incident devra être «à l’euro près» ; ce qui laisse supposer un nouveau bras de fer et de longues attentes.

Avant la visite sur le terrain, Christiane Lambert a été accueillie à Grandvilliers par Luc Smessaert et Thierry Bourbier.
Avant la visite sur le terrain, Christiane Lambert a été accueillie à Grandvilliers par Luc Smessaert et Thierry Bourbier. - © Dominique Lapyre-Cavé
Visite dans la Somme chez Christophe D’Halescourt, à droite.
Visite dans la Somme chez Christophe D’Halescourt, à droite. - © Vincent Fermon

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