L'Oise Agricole 09 février 2023 a 09h00 | Par R. M., J.J.

Bruxelles réfléchit à la réserve de crise agricole

Pour soutenir les agriculteurs des pays de l’UE limitrophes de l’Ukraine affectés par l’afflux d’importations de céréales ukrainiennes, la Commission européenne réfléchit à activer la réserve de crise agricole.

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Les fonds pourraient servir à financer des capacités de stockage de grains.
Les fonds pourraient servir à financer des capacités de stockage de grains. - © Nicolas Barjot / FrAgTW

En raison des perturbations engendrées par l’afflux de céréales ukrainiennes bon marché dans les pays de l’UE limitrophes, le commissaire à l’Agriculture, Janusz Wojciechowski, a proposé, le 30 janvier, de mobiliser tout ou partie de la réserve de crise agricole d’un montant de 450 M€ pour soutenir les agriculteurs de ces pays (Pologne, Bulgarie, République tchèque, Hongrie, Roumanie et la Slovaquie). Il envisage que les fonds, s’ils sont débloqués, puissent servir à financer des capacités de stockage de grains. Cette mesure sera présentée prochainement au collège des commissaires européens.

Distorsions de concurrence

Sans demander à limiter les importations ukrainiennes, la Pologne a alerté, sur «la hausse spectaculaire», depuis le lancement de l’initiative des Voies de solidarité (dispositif logistique mis en place par l’UE pour faciliter les exportations de produits ukrainiens via l’UE) des importations de maïs ukrainien en 2022 par rapport aux années précédentes. Par exemple, les importations vers la Pologne se sont élevées à 1,6 Mt t en 2022 contre 6 000 t pour la période de janvier à novembre 2021. De son côté, Sofia attire aussi l’attention sur les importations de tournesol en provenance d’Ukraine qui ont atteint 804 000 t en 2022 contre 36 074 t un an plus tôt.

Au regard des distorsions de concurrence créées par ces flux, la Pologne appelle la Commission européenne à proposer des instruments pour soutenir les producteurs en difficulté en leur versant une compensation et en adoptant une approche flexible de la mise en oeuvre de la Pac par les États membres de l’UE. Par ailleurs, Varsovie invite Bruxelles à plus de vigilance pour que les produits agricoles ukrainiens importés par les Voies de solidarité transitent seulement par les États membres pour atteindre ensuite les pays tiers (Afrique, Moyen-Orient). À cette fin, elle demande à l’exécutif européen de renforcer son soutien financier en créant des entrepôts temporaires et de nouveaux couloirs de transport, y compris par voie ferroviaire.

Perspectives positives

Outre ces perturbations locales, le commissaire à l’Agriculture, Janusz Wojciechowski, a indiqué qu’il y avait de bonnes nouvelles concernant le secteur des céréales. «Les cultures d’hiver ont été plantées et des rapports indiquent que suffisamment d’engrais étaient disponibles et appliqués. Quant aux stocks, ils sont également suffisants pour les semailles de printemps, avec des prix qui restent encore modérés», indique-t-il. Autre signe positif concernant les revenus des agriculteurs qui «ont augmenté de 13,1 % en 2022 par rapport à l’année précédente», ajoute le commissaire. Cette évolution s’explique surtout «par une hausse spectaculaire des prix à la production pour les céréales et les oléagineux, immédiatement après le début de la guerre en Ukraine. Et dans de nombreux cas, les agriculteurs ont aussi bénéficié des stocks existants d’engrais et d’aliments pour animaux qui avaient été achetés avant la flambée des prix», prévient Janusz Wojciechowski.

Vers une nouvelle baisse de la récolte ukrainienne en 2023

Les surfaces semées ont diminué et la récolte de céréales et d’oléagineux en Ukraine devrait encore baisser en 2023. Après les 106 millions de tonnes récoltées en 2021, un record historique, puis une récolte 2022 plombée par la guerre, à environ 67 millions de tonnes, l’Ukrainian Grain association (UGA) évalue la production en 2023 à «53 millions de tonnes». «Nous sommes en guerre [...] Malgré tout, nous continuons de faire pousser des céréales, mais les récoltes vont baisser. Pour les agriculteurs, ce n’est plus rentable», a déclaré le 26 janvier Nikolay Gorbachov, président de l’UGA, lors d’une conférence sur les céréales organisée par Argus Media. Il a souligné qu’en bout de chaîne, les agriculteurs ukrainiens ne retiraient que 80 dollars par tonne de maïs, alors que le grain jaune s’échange autour de 300 dollars sur les marchés, essentiellement en raison de la hausse considérable du coût du transport.

La campagne de semis 2022 a été entravée, en raison des combats, du manque de carburant et de la destruction d’une partie des machines agricoles et des infrastructures de stockage. Cela a conduit à la réduction d’environ un quart de la surface cultivée par rapport à l’année précédente, rappelle l’UGA. Si l’ouverture d’un corridor maritime pour les exportations ukrainiennes, après un accord signé fin juillet par Kiev et Moscou sous l’égide de l’ONU et de la Turquie, a permis de sortir près de 20 Mt de produits agricoles, ce n’est pas suffisant pour Nikolay Gorbatchov. Il s’est dit inquiet pour les exportations de la prochaine campagne alors qu’une renégociation devrait avoir lieu en mars : «Si l’Ukraine ne peut pas exporter, les prix augmenteront. L’Europe peut se le permettre, mais pas les pays en développement.»

 

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